kalena dirghena mahan abhud vyayah
vikrsyamanasya jale vasidato
viparyayo bhut sakalam jalaukasah
Entraîné dans l'eau et combattant pendant de longues années, l'éléphant vit sa vigueur ainsi que sa force mentale et physique s'amenuiser. Le crocodile, au contraire, étant un animal aquatique, voyait s'accroître son ardeur, sa force et sa vigueur.
Dans cette lutte qui opposait l'éléphant au crocodile, bien que l'éléphant fût très puissant, le fait qu'il fut dans l'eau, milieu étranger pour lui, pesait lourd dans la balance. Pendant les mille ans que dura la lutte, il ne put absorber aucune nourriture; en conséquence, sa force corporelle s'amenuisa, ce qui affaiblit également son mental et ses sens. Le crocodile, au contraire, étant un animal aquatique, n'éprouvait aucune difficulté. Il avait de quoi se nourrir et gagnait ainsi force mentale et stimulation des sens. Il devenait de plus en plus puissant, alors que l'éléphant s'affaiblissait. Nous pouvons tirer la leçon suivante de cette histoire: dans la lutte qui nous oppose à maya, nous ne devrions pas être dans une situation où notre force, notre enthousiasme et nos sens ne nous sont d'aucun secours pour nous battre avec vigueur. Notre Mouvement pour la Conscience de Krsna a en fait déclaré la guerre à l'énergie d'illusion dans laquelle croupissent tous les êtres vivants qui se méprennent sur la véritable nature d'une civilisation. Les combattants du Mouvement pour la Conscience de Krsna doivent toujours avoir de la force physique, de l'enthousiasme et des sens alertes. Pour rester en bonne condition, ils doivent donc vivre dans une situation normale. Or, cette norme n'est pas la même pour tous; telle est la raison de l'existence des divisions du varnasrama —brahmanas, ksatriyas, vaisyas, sudras, brahmacarya, grhastha, vanaprastha et sannyasa. Dans le présent âge, le kali-yuga, il est recommandé que personne ne devienne sannyasi.
sannyasam pala-paitrkam
devarena sutotpattim
kalau panca vivarjayet
(Brahma-vaivarta Purana)
Ce verset nous indique que le sannyasa-asrama est interdit dans l'âge où nous vivons, car les gens n'ont pas suffisamment de force spirituelle. Sri Caitanya Mahaprabhu embrassa l'ordre du renoncement à l'âge de vingt-quatre ans afin de nous servir d'exemple, mais même Sarvabhauma Bhattacarya Lui conseilla d'être extrêmement prudent du fait qu'Il avait entrepris cette démarche si jeune. Pour la prédication, nous accordons l'ordre du sannyasa à des hommes jeunes, mais en fait nous voyons qu'ils ne sont pas prêts pour cet asrama. Il n'y a pas de mal, cependant, à penser que l'on n'est pas mûr pour le sannyasa; si le désir sexuel est très fort, on devrait alors opter pour l'asrama où les rapports sexuels sont autorisés, c'est-à-dire le grhastha-asrama. Ce n'est pas parce que l'on s'est révélé très faible dans une situation donnée que l'on doit cesser de combattre le crocodile de maya; il faut plutôt chercher refuge aux pieds pareils-au-lotus de Krsna, comme nous verrons Gajendra le faire, et en même temps vivre en grhastha si les rapports sexuels nous satisfont. Il ne faut pas abandonner la lutte. C'est pourquoi Sri Caitanya Mahaprabhu recommanda: sthane sthitah sruti-gatam tanu-vanmanobhih. On peut rester dans l'asrama qui nous convient le mieux; il n'est pas essentiel d'embrasser l'ordre du renoncement. Celui qui est troublé par le désir sexuel peut entrer dans le grhastha-asrama; mais il doit continuer la lutte. Embrasser l'ordre du renoncement alors que l'on n'est pas parvenu au niveau transcendantal n'est guère méritoire. Si le sannyasa ne convient pas, on peut alors opter pour le grhastha-asrama et combattre maya avec beaucoup de force. Mais on ne devrait pas abandonner le combat et partir.