SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3
CHAPITRE 31

Les pérégrinations
de l'âme incarnée
selon Sri Kapila.

VERSET 21

tasmad aham vigata-viklava uddharisya
atmanam asu tamasah suhrdatmanaiva
bhuyo yatha vyasanam etad aneka-randhram
ma me bhavisyad upasadita-visnu-padah

TRADUCTION

Aussi, sans plus me laisser troubler, je vais m'arracher aux ténèbres de l'ignorance avec l'aide de mon amie, la claire conscience. Il me suffira de garder en mon coeur les pieds pareils-au-lotus de Sri Visnu pour ne plus avoir à entrer dans le sein d'autres mères et subir le cycle des morts et des renaissances.

TENEUR ET PORTEE

Les souffrances propres à l'existence matérielle commencent à se manifester dès le jour où l'âme spirituelle trouve refuge dans l'ovule et le sperme combinés d'une mère et d'un père; elles continuent après la naissance, puis se prolongent. A vrai dire, nous ne savons pas quand elles se terminent, mais de toutes façons, ce n'est certes pas en changeant de corps. Le changement de corps se produit à chaque instant, mais cela ne signifie en rien que nous améliorons notre condition par rapport à l'état foetal. La meilleure chose à faire consiste donc à développer notre conscience de Krsna. Nous avons ici les mots upasadita-visnu-padah, qui se rapportent à la réalisation spirituelle, dans la Conscience de Krsna. Celui qui, par la grâce du Seigneur, possède l'intelligence nécessaire pour développer sa conscience de Krsna voit son existence couronnée de succès, car il lui suffira de se maintenir dans cette conscience de Krsna pour être délivré du cycle des morts et des renaissances.

Dans sa prière, l'enfant souligne qu'il vaut mieux demeurer dans les ténèbres de la matrice mais constamment absorbé dans la conscience de Krsna, que d'en sortir pour devenir à nouveau une victime de l'énergie illusoire. En fait, celle-ci agit aussi bien à l'intérieur de la matrice qu'à l'extérieur; la solution consiste donc à rester conscient de Krsna, car ainsi l'horrible condition où l'on se trouve ne pourra plus exercer son effet néfaste. La Bhagavad-gita enseigne que l'intelligence peut tout aussi bien être notre amie que notre ennemie, et ce verset reprend la même idée avec le mot suhrdatmanaiva, qui désigne l'intelligence amie. L'absorption de l'intelligence dans le service personnel de Krsna et la pleine conscience de Krsna constituent en toute circonstance la voie de la réalisation spirituelle et de la libération. Sans nous laisser troubler inutilement, si nous adoptons cette voie par le chant constant du mantra

hare krsna hare krsna krsna krsna hare hare
hare rama hare rama rama rama hare hare

nous pourrons mettre un terme définitif au cycle des morts et des renaissances.

On peut se demander comment il est possible qu'un enfant soit pleinement conscient de Krsna dans le sein de sa mère, alors qu'il ne dispose de rien pour pratiquer la Conscience de Krsna. Mais le fait est qu'il n'est besoin de rien de particulier pour adorer Dieu, la Personne Suprême, Visnu. L'enfant désire demeurer à l'intérieur du ventre de sa mère, et en même temps s'affranchir de l'emprise de maya. Aucune circonstance matérielle particulière n'est requise pour développer sa conscience de Krsna. Quels que soient l'endroit et les circonstances, il suffit de toujours penser à Krsna. Le maha-mantra

hare krsna hare krsna krsna krsna hare hare
hare rama hare rama rama rama hare hare

peut être chanté même dans le ventre de la mère. On peut en fait le chanter en dormant, en travaillant, prisonnier ou libéré du ventre de la mère. Rien ne peut entraver cette conscience de Krsna. La conclusion de l'enfant est donc la suivante: "Je souhaite demeurer dans cette condition; bien qu'elle soit des plus misérables, je préfère rester ici plutôt que sortir pour devenir à nouveau la proie de maya."

VERSET 22

kapila uvaca
evam krta-matir garbhe
dasa-masyah stuvann rsih
sadyah ksipaty avacinam
prasutyai suti-marutah

TRADUCTION

Sri Kapila poursuivit:
L'enfant âgé de dix mois nourrit ces désirs alors même qu'il se trouve encore dans le ventre de sa mère. Mais tandis qu'il loue ainsi le Seigneur, le souffle qui favorise l'accouchement le propulse la tête en bas, afin de le faire naître.

VERSET 23

tenavasrstah sahasa
krtvavak sira aturah
viniskramati krcchrena
nirucchvaso hata-smrtih

TRADUCTION

Soudain poussé par ce souffle, l'enfant sort à grand-peine, la tête en bas, incapable de respirer et privé de mémoire sous l'effet de l'intense douleur.

TENEUR ET PORTEE

Le mot krcchrena signifie "avec grande difficulté". Ainsi, lorsque l'enfant sort de la matrice par son orifice étroit, la pression l'empêche complètement de respirer, et la douleur intense lui fait perdre la mémoire. Parfois, la souffrance est telle qu'à la naissance l'enfant est déjà mort ou presque à l'agonie. On peut donc imaginer quelles peuvent être les affres de la naissance. L'enfant doit rester dix mois dans cette condition intenable à l'intérieur de la matrice, et au bout de cette période, il se voit expulsé de force. Le Seigneur souligne dans la Bhagavad-gita qu'une personne sérieuse quant au développement de sa conscience spirituelle doit toujours garder conscience des quatre maux que sont la naissance, la maladie, la vieillesse et la mort. Le matérialiste peut progresser en maints domaines, mais il est incapable de mettre un terme à ces quatre formes essentielles de la souffrance, inhérentes à l'existence matérielle.

VERSET 24

patito bhuvy asrn-misrah
vistha-bhur iva cestate
roruyati gate jnane
viparitam gatim gatah

TRADUCTION

L'enfant tombe alors sur le sol, couvert d'excréments et de sang, et s'agite tel un ver issu de matières fécales. Il oublie sa connaissance supérieure et se met à pleurer, envoûté par maya.

VERSET 25

para-cchandam na vidusa
pusyamano janena sah
anabhipretam apannah
pratyakhyatum anisvarah

TRADUCTION

Après sa sortie de la matrice, l'enfant est abandonné aux soins de personnes incapables de comprendre ce qu'il veut et qui s'occupent néanmoins de lui. Ne pouvant refuser ce qu'on lui donne, il se trouve dans une situation indésirable.

TENEUR ET PORTEE

Dans le ventre de la mère, l'enfant était nourri par les soins de la nature. Les conditions régnant à l'intérieur de la matrice n'étaient pas du tout plaisantes, mais au moins en ce qui concernait sa nourriture, ses besoins étaient assurés par les lois de la nature. Une fois sorti du sein maternel, il se retrouve dans un environnement tout à fait différent. Il désire manger une chose et on lui en donne une autre car personne ne le comprend, et il n'est pas à même de refuser ce qu'on lui présente. Parfois, il pleure pour que sa mère lui donne le sein, mais sa nourrice lui administre un médicament amer, croyant que ses cris sont dus à quelques maux d'estomac. L'enfant n'en veut pas, mais comment pourrait-il refuser? C'est ainsi qu'il se voit confronté à des situations pour le moins inconfortables et qu'il continue de souffrir.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare