SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3
CHAPITRE 30

Sri Kapila décrit les actes
intéressés néfastes.

VERSET 1

kapila uvaca
tasyaitasya jano nunam
nayam vedoru-vikramam
kalyamano pi balino
vayor iva ghanavalih

TRADUCTION

Le Seigneur Souverain dit:
Tout comme une masse de nuages, qui ne connaît pas la force du vent, l'être absorbé dans une conscience matérielle ignore la puissance redoutable du temps qui l'emporte.

TENEUR ET PORTEE

L'illustre politicien et pandita du nom de Canakya affirmait que nul ne saurait retrouver un seul instant de son existence, même s'il se montrait disposé à le racheter pour des millions. Le temps est si précieux qu'on ne saurait évaluer à quel point il est grave de le gaspiller. Que ce soit sur le plan matériel ou spirituel, chacun doit être très attentif à utiliser le temps dont il dispose. L'âme conditionnée vit dans un corps donné pour un temps déterminé, et les Écritures recommandent que ce temps infime soit employé à parfaire sa conscience de Krsna de manière à pouvoir s'arracher à l'influence de l'élément temps. Mais dans leur infortune, ceux qui vivent hors de la Conscience de Krsna se trouvent emportés par la puissance redoutable du temps, sans même en avoir conscience, comme de simples nuages emportés par le vent.

VERSET 2

yam yam artham upadatte
duhkhena sukha-hetave
tam tam dhunoti bhagavan
puman chocati yat-krte

TRADUCTION

Quoi que produise le matérialiste au prix de maints tourments et efforts en vue d'un prétendu bonheur, le Seigneur Suprême, sous la forme du temps, le détruit; et c'est pourquoi l'âme conditionnée s'afflige.

TENEUR ET PORTEE

La fonction principale de l'élément temps, qui représente le Seigneur Souverain, est de détruire toute chose. Les matérialistes, plongés dans une conscience matérielle, s'emploient à produire mille et mille choses au nom du développement économique. Ils croient qu'en s'efforçant toujours davantage de satisfaire les besoins matériels de l'homme, ils trouveront le bonheur; mais ils oublient que toute chose créée par eux sera détruite tôt ou tard. L'histoire nous fournit l'exemple de nombre d'empires puissants qui furent érigés à force de labeur et persévérance, mais qui furent tous finalement balayés dans le cours du temps. Cependant, les matérialistes insensés restent incapables de comprendre qu'ils perdent simplement leur temps en s'acharnant à produire des biens matériels, puisque ceux-ci sont tous destinés à l'anéantissement sous l'influence du temps. Ce gaspillage d'énergie provient de l'ignorance de la masse des hommes, lesquels n'ont pas conscience d'être éternels et d'avoir une occupation éternelle. Ils ne savent pas que la durée de leur existence dans un corps donné ne représente qu'un éclair dans leur voyage éternel. Ignorant ce fait, ils considèrent cette brève lueur d'existence comme l'unique réalité, et perdent leur temps à améliorer leur situation économique.

VERSET 3

yad adhruvasya dehasya
sanubandhasya durmatih
dhruvani manyate mohad
grha-ksetra-vasuni ca

TRADUCTION

Le matérialiste fourvoyé ignore que son corps est temporaire, et que l'attrait pour le foyer, la terre et la richesse, lié au corps, relève également de l'éphémère. L'ignorance seule lui fait croire que tout est durable.

TENEUR ET PORTEE

Le matérialiste voit les personnes ayant adopté la Conscience de Krsna comme des fous qui perdent leur temps à chanter Hare Krsna; mais à vrai dire, il ignore qu'il se trouve lui-même dans les plus sombres régions de la bêtise, car il tient son corps pour éternel, et avec lui, tout ce qui s'y rattache -son foyer, sa patrie, sa société, et tout ce qui forme le monde dans lequel il vit. Cette vision matérialiste n'est rien d'autre que l'illusion de Maya. Ce verset l'exprime en termes clairs, mohad grha-ksetra-vasuni: seule l'illusion fait croire au matérialiste que son foyer, sa terre et son argent ont un caractère permanent. C'est sous le coup de cette illusion que se sont développés les aspects majeurs de la civilisation moderne, soit la vie familiale et nationale, ainsi que l'essor économique. Mais un être conscient de Krsna sait que ce développement économique de la société n'est qu'une illusion passagère.

Un autre passage du Srimad-Bhagavatam nous enseigne que de considérer son corps comme le moi véritable, de voir d'autres êtres comme ses proches du fait d'un lien corporel, et de tenir pour sacrée sa terre natale, ne représentent qu'autant de produits d'une civilisation animale. Toutefois, lorsqu'on progresse dans la Conscience de Krsna, on peut utiliser toutes ces choses pour le service du Seigneur. Et c'est là une proposition tout à fait convenable, car tout se trouve lié à Krsna. Or, lorsque le développement économique et le progrès matériel sont utilisés en vue de promouvoir la cause de la Conscience de Krsna, une nouvelle phase de progrès voit alors le jour.

VERSET 4

jantur vai bhava etasmin
yam yam yonim anuvrajet
tasyam tasyam sa labhate
nirvrtim na virajyate

TRADUCTION

Quelle que soit l'espèce au sein de laquelle il voit le jour, l'être distinct y trouve une forme de satisfaction particulière, si bien qu'il n'est jamais mécontent de sa condition.

TENEUR ET PORTEE

Le sentiment de satisfaction qu'éprouve l'être distinct à l'intérieur d'un corps donné, même si ce dernier est des plus répugnants, est ce qu'on appelle l'illusion. Un homme de haute condition sera insatisfait s'il doit connaître un niveau de vie inférieur, mais, sous l'influence de maya, l'énergie externe, l'homme de basse condition, lui, se trouvera heureux dans cette situation. Maya agit en deux phases, respectivement nommées praksepatmika et avaranatmika; avaranatmika signifie "recouvrir", et praksepatmika "tirer vers le bas". Dans toute condition de vie où il se voit plongé, le matérialiste et l'animal éprouveront une certaine satisfaction, due au fait que leur savoir est voilé par l'influence de maya. Au niveau d'existence le plus bas, dans les espèces inférieures, la conscience s'avère si pauvre que l'être ne peut même pas comprendre s'il est heureux ou malheureux. Cet état de fait s'appelle aravanatmika. Ainsi, même le porc, qui se nourrit d'excréments, est content de son sort, alors qu'une personne dont le mode de vie est supérieur aura conscience du caractère abominable d'une telle existence.

VERSET 5

naraka-stho pi deham vai
na pumams tyaktum icchati
narakyam nirvrtau satyam
deva-maya-vimohitah

TRADUCTION

L'être conditionné est content de son sort quelle que soit l'espèce à laquelle il appartienne. Egaré par l'influence de l'énergie illusoire qui recouvre sa vision, il n'est guère enclin à abandonner son corps, même s'il vit en enfer, car il se complait dans les plaisirs les plus vils.

TENEUR ET PORTEE

Il est dit qu'un jour, Indra, le roi des cieux, fut maudit par son maître spirituel, Brhaspati, pour s'être mal conduit, à la suite de quoi il dut revêtir la forme d'un porc sur notre planète. Quelques temps plus tard, lorsque Brahma voulut lui faire regagner son royaume édénique, Indra, qui dans cette forme de porc avait tout oublié de sa position royale sur les planètes supérieures, refusa d'y retourner. Tel est le sortilège de maya: même Indra peut oublier ses normes de vie édénique pour se contenter de celles d'un porc. Sous l'influence de maya, l'âme conditionnée en vient à affectionner son corps à un point tel que même si on lui offre de renoncer à ce corps pour obtenir aussitôt celui d'un roi, elle s'y refusera. Cette sorte d'attachement agit profondément sur toutes les âmes conditionnées. Sri Krsna ne cesse de nous solliciter: "Laisse là cet univers matériel. Viens à Moi et Je t'accorderai toute protection". Mais nous rejetons Sa proposition car nous pensons: "Je me trouve parfaitement bien comme je suis. Pourquoi devrais-je m'abandonner à Krsna et retourner en Son royaume?" C'est ce qu'on appelle l'illusion, ou maya. Ainsi chacun se contente-t-il de son mode de vie, aussi abominable soit-il.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare