SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3 CHAPITRE 29 Le service de dévotion
expliqué par Sri Kapila.
mad-dhisnya-darsana-sparsa-
puja-stuty-abhivandanaih bhutesu mad-bhavanaya sattvenasangamena ca
Parmi les devoirs du bhakta, on compte l'adoration dans le temple. Celle-ci est particulièrement recommandée pour les néophytes, mais les bhaktas plus évolués ne doivent pas pour autant s'en abstenir. Ces deux catégories de bhaktas perçoivent différemment la présence du Seigneur dans le temple. Le bhakta néophyte considère l'arca-vigraha (la statue du Seigneur) différente de l'Etre Divin originel; il voit en elle une représentation du Seigneur Suprême, Sa manifestation sous la Forme d'une murti. Mais le bhakta évolué accepte la murti dans le temple comme Dieu Lui-même, la Personne Souveraine. Il ne fait aucune différence entre la Forme originelle du Seigneur et Sa statue, ou Sa Forme arca, dans le temple. Telle est la vision d'un bhakta dont le service de dévotion se situe au plus haut niveau du bhava, de l'amour pour Dieu; quant à l'adoration du néophyte, elle n'est qu'une question de routine. L'adoration de la murti dans le temple s'inscrit donc au nombre des activités du bhakta. Il va régulièrement contempler la murti, merveilleusement décorée, et avec vénération et respect, touche Ses pieds pareils-au-lotus; il Lui fait également diverses offrandes, tels des fruits et des fleurs, mais aussi des prières. Simultanément, pour progresser dans le service de dévotion, le bhakta doit alors apprendre à voir les êtres qui l'entourent comme autant d'étincelles spirituelles, de parties infimes du Seigneur Suprême. Le bhakta doit offrir ses respects à tout être uni au Seigneur par une relation personnelle. Et parce qu'à l'origine tous les êtres ont une relation avec le Seigneur, en tant que fragments de Sa Personne, le bhakta doit s'efforcer de les voir tous d'un oeil égal, sur le plan spirituel. Selon la Bhagavad-gita, le pandita, ou l'érudit, voit d'un même oeil le docte brahmana et le sudra, aussi bien que le porc, le chien ou la vache. Ses yeux ne s'arrêtent pas au corps, qui n'est qu'une enveloppe externe; il ne voit pas le vêtement du brahmana, celui de la vache ou du porc, il perçoit directement l'âme spirituelle, laquelle fait partie intégrande du Seigneur Suprême. Un bhakta ne voyant pas ainsi tous les êtres est un prakrta-bhakta, ou un bhakta matérialiste. C'est-à-dire qu'il n'est pas encore vraiment établi au niveau spirituel; il se trouve en fait au niveau le plus bas de la dévotion. Mais il n'en montre pas moins tout son respect à la murti. Bien que le bhakta voie tous les êtres sur un même niveau d'existence spirituelle, il ne recherche pas la compagnie de n'importe qui. Ainsi, ce n'est pas parce que le tigre fait aussi partie intégrante du Seigneur Suprême et qu'il a une relation spirituelle avec Lui qu'on va s'empresser de l'étreindre. Nous ne devons rechercher que la compagnie des êtres qui ont développé en eux la conscience de Krsna. Nous devons offrir un respect particulier aux personnes avancées dans la Conscience de Krsna, et nous en faire des amis. Les autres êtres font sans l'ombre d'un doute partie du Seigneur Suprême, mais parce que leur conscience se trouve encore voilée et qu'ils n'ont pas atteint un haut niveau de conscience de Krsna, nous devons renoncer à leur compagnie. Visvanatha Cakravarti Thakura affirme qu'il faut éviter la compagnie de quiconque fait preuve d'un tempérament douteux, même s'il s'agit d'un vaisnava. Bien sûr, cela ne doit pas nous empêcher de respecter ce vaisnava; quiconque reconnaît que Visnu est Dieu, la Personne Suprême, doit être tenu pour un vaisnava, mais le vaisnava est censé développer toutes les qualités des devas. La signification exacte du mot sattvena nous est donnée par Sridhara Svami, qui le dit être un synonyme de dhairyena, ou patience. Il faut en effet pratiquer le service de dévotion en faisant preuve d'une grande patience. Il ne s'agit pas de l'abandonner après une ou deux tentatives infructueuses; on doit persévérer. Sri Rupa Gosvami confirme également qu'il faut accomplir le service de dévotion avec patience et conviction, animé d'un enthousiasme débordant. La patience s'avère nécessaire si nous voulons acquérir la conviction que "Krsna finira certainement par me reconnaître si je pratique le service de dévotion". Il suffit d'accomplir ainsi son service, suivant les règles établies, pour connaître le succès.
mahatam bahu-manena
dinanam anukampaya maitrya caivatma-tulyesu yamena niyamena ca
Le troisième chapitre de la Bhagavad-gita explique clairement qu'il faut pratiquer le service de dévotion et progresser sur la voie du savoir spirituel en s'en remettant à un acarya. Acaryopasanam: il faut vénérer un acarya, un maître spirituel qui voit les choses dans leur vérité. Un tel maître doit appartenir à la filiation spirituelle qui remonte à Krsna. Ainsi, les prédécesseurs du maître spirituel sont successivement son propre maître ou père spirituel, son aïeul spirituel, son bisaïeul spirituel, et ainsi de suite, et ils forment ensemble la succession disciplique des acaryas. Or, notre verset recommande de porter le plus grand respect à tous les acaryas. On lit dans un autre passage des Ecritures: gurusu nara-matih. Le mot gurusu désigne les acaryas, et nara-matih signifie "considérant comme des hommes ordinaires". Le fait de penser que les vaisnavas, ou les bhaktas, appartiennent à telle caste ou tel groupe de la société, de considérer les acaryas comme des hommes ordinaires ou de voir la murti dans le temple comme un objet de pierre, de bois ou de métal, se trouve strictement réprouvé. Niyamena: il faut offrir le plus grand respect aux acaryas suivant les règles établies. Le bhakta doit encore se montrer compatissant envers les infortunés. Mais comprenons bien que ce terme ne désigne pas les personnes appauvries matériellement; selon la vision dévotionnelle, un homme est infortuné s'il ne vit pas dans la Conscience de Krsna. Il peut s'avérer très riche en biens matériels, mais s'il n'est pas conscient de Krsna, on le tiendra pour pauvre, ou infortuné. Par ailleurs, plusieurs acaryas, tels Rupa Gosvami et Sanatana Gosvami, n'avaient pour abri, chaque soir, que la frondaison des arbres. De l'extérieur, ils pouvaient donc sembler très pauvres, mais leurs Ecrits nous révèlent qu'en matière de spiritualité, nul n'était plus riche qu'eux. Ainsi le bhakta fait-il preuve de compassion envers les âmes infortunées, privées de savoir spirituel, en les éclairant pour les élever jusqu'au niveau de la Conscience de Krsna. C'est là un de ses devoirs. Mais il doit tout aussi bien se lier d'amitié avec ceux qui se trouvent au même niveau que lui ou qui partagent la même compréhension des choses. Le bhakta n'a aucun intérêt à se lier avec des personnes ordinaires; il doit plutôt s'unir à d'autres bhaktas de façon à ce qu'à travers leurs échanges ils puissent s'aider les uns les autres à progresser sur la voie de l'entendement spirituel. C'est d'ailleurs là le sens des mots istha-gosthi. La Bhagavad-gita utilise également les mots bodhayantah parasparam, qui signifient "discutent entre eux". En général, les purs bhaktas emploient leur temps, si précieux, à glorifier le Seigneur et à discuter entre eux des diverses Activités de Sri Krsna ou de Sri Caitanya. On trouve d'innombrables ouvrages, comme les Puranas, le Mahabharata, le Srimad-Bhagavatam, la Bhagavad-gita et les Upanisads, qui contiennent mille et mille sujets de discussion pour les vaisnavas, qu'ils soient deux ou plus. Les hommes ayant des intérêts communs et une compréhension similaire devraient sceller entre eux des liens d'amitié. On qualifie de telles personnes de sva-jati, ce qui signifie "de même groupe social". D'autre part, le bhakta doit éviter ceux dont l'esprit ne se trouve pas fermement établi dans une juste compréhension des choses; même s'il s'agit d'un vaisnava ou d'un dévot de Krsna, il faut l'éviter si sa mentalité ne s'avère pas tout à fait représentative. Il faut donc fermement maîtriser les sens et le mental, adhérer de façon stricte aux règles et principes établis, puis se lier d'amitié avec les hommes du même niveau que soi.
adhyatmikanusravanan
nama-sankirtanac ca me arjavenarya-sangena nirahankriyaya tatha
Celui qui désire progresser dans sa compréhension des choses spirituelles doit écouter auprès de sources authentiques ce qui touche au savoir absolu. En outre, la réalité de la vie spirituelle ne se trouve révélée qu'à celui qui adhère strictement aux principes régulateurs et qui maîtrise ses sens. Pour accéder à cette maîtrise de soi, il faut être non violent, véridique, ne pas voler, s'abstenir de toute activité sexuelle et ne posséder que ce qui est absolument nécessaire au maintien du corps. Il ne faut pas absorber davantage de nourriture que le corps en a besoin, amasser plus de biens que nécessaire, ni s'entretenir inutilement avec les hommes du commun. Il faut encore éviter de suivre les règles sans en comprendre le but; mais il faut néanmoins savoir les respecter de manière à réaliser des progrès tangibles. La Bhagavad-gita énumère pour sa part dix-huit qualités nécessaires, parmi lesquelles la simplicité. On doit être dénué d'orgueil et ne pas exiger vainement d'être respecté. Il faut également faire preuve de non-violence (amanitvam adambhitvam-ahimsa). Il faut se montrer très tolérant et simple, accepter le maître spirituel, et maîtriser les sens. Toutes ces qualités sont aussi bien mentionnées dans ce verset que dans la Bhagavad-gita. Il faut prêter l'oreille aux enseignements provenant de sources authentiques si l'on désire progresser dans la vie spirituelle; ces instructions doivent être reçues d'un acarya, puis assimilées. Nous trouvons ici spécifié, nama-sankirtanac ca: il faut chanter les Saints Noms du Seigneur
Le bhakta ne doit pas non plus s'enorgueillir de ses acquisitions. Ses traits caractéristiques doivent être la douceur et l'humilité. Même s'il est très évolué spirituellement, il restera doux et humble, à l'exemple de Kaviraja Gosvami et de tous les autres vaisnavas. Caitanya Mahaprabhu nous a enseigné à devenir plus humble qu'un fétu de paille dans la rue et plus tolérant qu'un arbre. Il ne faut donc pas se montrer orgueilleux ou infatué de sa personne; ainsi sera-t-on assuré de progresser dans la vie spirituelle.
mad-dharmano gunair etaih
parisamsuddha asayah purusasyanjasabhyeti sruta-matra-gunam hi mam
Dès le début de Ses instructions à Sa mère, le Seigneur lui expliqua qu'à travers la simple écoute du Nom, des Attributs, de la Forme, etc., du Seigneur Souverain (mad-guna-sruti-matrena), l'être éprouve aussitôt de l'attrait pour Lui. C'est en observant les règles et principes énoncés dans diverses Ecritures que l'on développe toutes les qualités spirituelles. Au contact de la matière, nous avons acquis certains traits indésirables, mais en adhérant à la voie que nous venons de décrire, nous pouvons nous affranchir de cette souillure. Ainsi que l'expliquait le verset précédent, il faut, pour développer les qualités spirituelles, se débarrasser de ces caractéristiques matérielles, impures.
yatha vata-ratho ghranam
avrnkte gandha asayat evam yoga-ratam ceta atmanam avikari yat
De même qu'une brise portant les doux arômes d'un jardin de fleurs s'empare aussitôt de l'organe olfactif, une conscience saturée de dévotion peut en un rien de temps saisir l'existence spirituelle et absolue de Dieu, la Personne Souveraine, qui, dans Sa Forme de Paramatma, Se trouve partout présent, et même dans le coeur de chaque être. La Bhagavad-gita enseigne que le Seigneur Suprême est ksetra-jna, qu'Il est présent non seulement dans un corps donné, mais simultanément dans le corps de tous les êtres. Parce que l'âme distincte n'est présente que dans un corps particulier, elle devient contrariée lorsqu'une autre âme distincte refuse de coopérer avec elle. L'Ame Suprême, cependant, est partout présente; les âmes distinctes peuvent se trouver en désaccord avec Elle, mais Elle reste immuable, ou avikari, car Elle est présente de façon égale dans tous les corps. L'âme distincte, lorsqu'elle est parfaitement imprégnée de la conscience de Krsna, peut percevoir la présence de l'Ame Suprême. C'est d'ailleurs ce que confirme la Bhagavad-gita (XVIII.55) lorsqu'elle dit qu'une personne baignant dans le service de dévotion, en pleine conscience de Krsna, peut connaître Dieu, que ce soit en tant qu'Ame Suprême ou que Personne Souveraine (bhaktya mam abhijanati).
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |