SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3 CHAPITRE 21 Entretien de
Manu avec Kardama.
yo rkendv-agnindra-vayunam
yama-dharma-pracetasam rupani sthana adhatse tasmai suklaya te namah
Kardama était un brahmana, et Svayambhuva un ksatriya; le sage n'avait donc pas à offrir son hommage au roi, car sa position sociale était plus élevée que celle du monarque. Mais il offrit néanmoins son hommage à Svayambhuva Manu, parce qu'en tant que roi et empereur, ce dernier représentait le Seigneur Suprême. Le Seigneur est toujours digne d'adoration, que ce soit pour un brahmana, un ksatriya, un vaisya ou un sudra. Et en tant que représentant du Seigneur Suprême, le roi méritait de recevoir l'hommage de tous.
na yada ratham asthaya
jaitram mani-ganarpitam visphurjac-canda-kodando rathena trasayann aghan
sva-sainya-carana-ksunnam
tadaiva setavah sarve
Il est du devoir d'un roi responsable de protéger les membres des différents groupes sociaux et spirituels qui constituent l'ensemble de la société. La vie spirituelle se divise en quatre étapes, ou asramas - le brahmacarya, le grhastha, le vanaprastha et le sannyasa-, et les divisions sociales, basées sur l'activité et les qualités de chacun, sont formées par les brahmanas, les ksatriyas, les vaisyas et les sudras. Ces divisions sociales, conçues en fonction des différentes occupations et aptitudes de chacun, sont définies dans la Bhagavad-gita. Malheureusement, pour ne pas avoir été suffisamment protégée par des rois responsables, cette institution fondée sur les divers ordres sociaux et spirituels est maintenant devenue un système de castes, basé sur l'hérédité. Mais ces castes n'ont rien du système d'origine. Par société humaine, on entend une société qui progresse vers la réalisation spirituelle. Et la plus évoluée de toutes les civilisations était celle des aryas, ce mot signifiant "qui progressent". La question est donc de savoir quelle société connaît le véritable progrès. Le progrès n'a rien à voir avec la création de besoins matériels artificiels, ni avec l'aggravation de la condition humaine représentée par le gaspillage de l'énergie de l'homme dans la recherche des prétendues douceurs de la vie. Le véritable progrès est celui qui mène à la réalisation spirituelle, et la civilisation qui oeuvrait dans ce sens était celle des aryas. Les hommes d'intelligence, les brahmanas, dont Kardama Muni nous est un exemple, s'employaient à faire avancer la cause spirituelle, et les ksatriyas, comme l'empereur Svayambhuva, avaient pour tâche de gouverner la nation et de veiller à ce que les citoyens aient à leur disposition toutes les facilités requises en vue de la réalisation spirituelle. Il est donc du devoir du roi de voyager partout à travers le pays pour s'assurer que tout est en ordre. La civilisation indienne, jadis basée sur les quatre varnas et asramas, s'est détériorée pour avoir subi le joug de peuples étrangers qui ne respectaient pas l'institution du varnasrama. C'est ainsi que cette structure a aujourd'hui dégénéré en un système de castes. Notre verset confirme que l'institution des quatre varnas et asramas est bhagavad-racita, c'est-à-dire "conçue par Dieu, la Personne Suprême". Ceci est d'ailleurs corroboré par la Bhagavad-gita (IV.13): catur-varnyam maya srstam. Par ces mots, le Seigneur déclare que cette institution a été créée par Lui. Or, rien de ce qui est créé par le Seigneur ne peut être détruit ou effacé. Les divisions des varnas et des asramas continueront d'exister, que ce soit dans leur forme originelle ou dans une forme dégradée, mais parce qu'elles ont été créées par Dieu, la Personne Suprême, rien ne peut les anéantir. Elles sont comme le soleil -une autre création de Dieu- que rien ne peut éteindre. Qu'il soit couvert de nuages ou qu'il brille dans un ciel dégagé, le soleil continue d'exister. Et de même, lorsque l'institution du varnasrama se dégrade, elle prend la forme du système héréditaire des castes; mais dans toute société, on n'en continue pas moins à trouver des intellectuels, des guerriers, des marchands et des manuels. Lorsque ces différents groupes sont organisés de manière à coopérer entre eux suivant les principes védiques, la société connaît paix et progrès spirituel. Mais lorsque entre ces couches sociales apparaissent la haine, le dérèglement et la défiance mutuelle, alors tout se dégrade et il en résulte, comme l'indique ce verset, une situation déplorable. A l'heure actuelle, le monde entier se trouve dans cet état déplorable pour avoir donné droit de cité à tant d'intérêts détournés. Ceci résulte de la dégradation des quatre varnas et des quatre asramas.
adharmas ca samedheta
lolupair vyankusair nrbhih sayane tvayi loko yam dasyu-grasto vinanksyati
Parce que l'institution scientifique des quatre varnas et des quatre asramas est aujourd'hui dissoute, le monde entier se trouve gouverné par des hommes indésirables n'ayant aucune formation religieuse, politique ni sociale, si bien que la planète se trouve dans une situation des plus déplorables. Cette institution s'appuie au contraire sur les principes d'une formation méthodique des différents groupes d'hommes. La société moderne a besoin d'ingénieurs, de médecins et d'électriciens, qui tous reçoivent une formation adéquate dans des établissements spécialisés. Or, on formait jadis avec un soin égal les représentants des groupes supérieurs de la société, à savoir les intellectuels (les brahmanas), les dirigeants (les ksatriyas) et les commerçants (les vaisyas). La Bhagavad-gita énonce les devoirs des brahmanas, des ksatriyas, des vaisyas et des sudras, mais lorsque aucune formation n'est donnée à ces groupes sociaux, les descendants de brahmanas ou de ksatriyas s'affublent de leurs titres honorifiques mais agissent comme des sudras. C'est l'imposture de certains hommes voulant s'ériger en représentants d'une classe supérieure qui réduisit l'institution scientifique du varnasrama à un système de caste, jusqu'à en dénaturer complètement la structure originelle. Aussi la société vit-elle maintenant dans le chaos, et on n'y trouve ni paix ni prospérité. Ce verset établit d'ailleurs clairement qu'en l'absence d'un roi puissant et vigilant, les mécréants et les hommes dénués de toute qualité se prétendront d'un certain statut, ce qui aura pour effet de rompre l'équilibre social.
athapi prcche tvam vira
yad-artham tvam ihagatah tad vayam nirvyalikena pratipadyamahe hrda
Lorsqu'un homme vient en hôte chez un ami, il est entendu qu'il poursuit un but précis. Kardama Muni pouvait donc comprendre qu'un aussi grand roi que Svayambhuva, mis à part le fait qu'il voyageait pour inspecter son royaume, devait bien avoir en tête quelque but particulier en visitant son ermitage; aussi le sage se préparait-il à combler son désir. Jadis, les sages avaient coutume de rendre visite aux rois, et de même ceux-ci se rendaient régulièrement chez les sages, dans leur ermitage; chacun se montrait heureux de pouvoir combler les désirs de l'autre. Cette relation réciproque est appelée bhakti-karya. Il existe à ce propos un très beau verset décrivant les échanges d'intérêt commun qui unissaient les brahmanas et les ksatriyas (ksatram dvijatvam). Le mot ksatram indique la royauté, et dvijatvam, l'ordre brahmanique. Ensemble, ceux-ci devaient veiller à leurs intérêts mutuels. Les rois protégeaient les brahmanas pour qu'ils favorisent le développement spirituel dans la société, et les brahmanas prodiguaient à l'ordre royal de précieux conseils sur la façon d'élever la société jusqu'à la perfection spirituelle. Ainsi s'achèvent les enseignements de Bhaktivedanta sur le vingt-et-unième chapitre du troisième Chant du Srimad-Bhagavatam, intitulé: "Entretien entre Manu et Kardama".
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