SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3 CHAPITRE 1 Les questions de Vidura.
saumyanusoce tam adhah-patantam
bhratre paretaya vidudruhe yah niryapito yena suhrt sva-purya aham sva-putran samanuvratena
Vidura ne s'enquit pas du bien-être de son frère aîné, car il n'y avait aucune chance de recevoir de bonnes nouvelles à son sujet; il aurait seulement entendu dire qu'il glissait vers l'enfer. Vidura était un sincère bienfaiteur de Dhrtarastra; aussi avait-il une pensée pour lui quelque part en son coeur. Il déplora donc que Dhrtarastra ait pu se rebeller contre les fils de son frère disparu, Pandu, et qu'il ait pu l'expulser -lui, Vidura- de sa propre maison, se pliant à la volonté de ses fils malveillants. En dépit de tels agissements, Vidura ne se fit jamais l'ennemi de Dhrtarastra, mais continua plutôt d'oeuvrer pour son bien; d'ailleurs, quand s'achèvera la vie de Dhrtarastra, il sera le seul à lui manifester une amitié véritable. C'est ainsi que se comporte un vaisnava du niveau de Vidura: il désire le plus grand bien de tous, même de ses ennemis.
so ham harer martya-vidambanena
drso nrnam calayato vidhatuh nanyopalaksyah padavim prasadac carami pasyan gata-vismayo tra
Bien qu'il fût le frère de Dhrtarastra, Vidura ne lui ressemblait aucunement. Par la grâce de Sri Krsna, il n'était pas insensé comme lui, et la compagnie de son frère ne pouvait nullement l'influencer. Dhrtarastra et ses fils matérialistes prétendaient à la domination du monde du seul fait de leur puissance. Le Seigneur les encouragea dans leur entreprise, si bien qu'ils s'enfoncèrent de plus en plus dans l'illusion. Vidura, au contraire, souhaitait servir sincèrement le Seigneur avec dévotion, ce qui l'amena à devenir une âme entièrement soumise à l'Absolue Personne Divine. Il put, au cours de ses pérégrinations, réaliser ces vérités, et s'affranchir ainsi de tout doute. Il n'éprouvait nulle déception à l'idée d'avoir dû quitter sa terre natale et son foyer, car il avait maintenant réalisé à travers sa propre expérience que de dépendre de la miséricorde du Seigneur représente une liberté plus grande que celle dont on croit jouir chez soi. Nul ne devrait embrasser l'ordre du renoncement s'il n'a la ferme conviction d'être protégé par le Seigneur. La Bhagavad-gita décrit cette étape de l'existence par les mots abhayam sattva-samsuddhih: en réalité, chaque être dépend totalement de la miséricorde du Seigneur, mais à moins d'être établi au niveau de la pureté, nul ne peut connaître cet état. Une telle dépendance a nom sattva-samsuddhih, ou "purification de l'existence", et le résultat de cette purification se manifeste par l'absence de crainte. Ainsi, un dévot du Seigneur, aussi appelé narayana-para, n'éprouve jamais aucune peur, car il demeure toujours conscient de ce que le Seigneur le protège en toutes circonstances. Habité par cette conviction, Vidura voyagea seul et ne fut reconnu ni remarqué par aucun ami ou ennemi. Il put ainsi jouir de la liberté sans obligation aucune à l'égard des nombreux devoirs de ce monde. A l'époque où Sri Krsna Se trouvait présent en personne au sein de ce monde mortel, dans Sa Forme éternelle de Syamasundara, toute de félicité, ceux qui n'étaient pas des purs bhaktas ne surent Le reconnaître ni apprécier Ses gloires. Avajananti mam mudha manusim tanum asritam:(1) Il est source d'égarement pour les abhaktas, mais Ses dévots peuvent Le voir sans cesse grâce au service dévotionnel qu'ils Lui offrent. (1) B.g.,IX.11
nunam nrpanam tri-madotpathanam
mahim muhus calayatam camubhih vadhat prapannarti-jihirsayeso py upaiksatagham bhagavan kurunam
Ainsi qu'Il le déclare Lui-même dans la Bhagavad-gita, le Seigneur apparaît dans le monde des mortels afin de S'acquitter de Sa mission, ô combien nécessaire, celle d'anéantir les mécréants et protéger les justes, accablés de souffrances. Néanmoins, en dépit de Sa mission, Sri Krsna toléra l'insulte faite à Draupadi par les Kurus et les injustices perpétrées contre les Pandavas, aussi bien d'ailleurs que les outrages dirigés contre Sa propre Personne. On peut dès lors se demander pourquoi le Seigneur a toléré autant de méfaits commis en Sa présence, et pourquoi Il S'abstint de châtier les Kurus. Rappelons-nous que lorsque Draupadi fut insultée dans l'assemblée des Kurus, lesquels voulaient la dévêtir pour exposer sa nudité aux yeux de tous, le Seigneur la protégea en donnant à son sari une longueur infinie; mais Il ne punit pas immédiatement les coupables. Toutefois, le silence du Seigneur n'indique nullement qu'Il avait pardonné l'offense des Kurus. Pour tout dire, il existait sur terre nombre d'autres rois que la richesse, l'éducation et de nombreux sujets avaient gonflés d'un orgueil excessif, et qui accablaient la Terre sans relâche par le mouvement de leurs forces armées. Le Seigneur attendait donc tout simplement qu'ils soient tous réunis sur le champ de bataille de Kuruksetra pour les détruire d'un coup et abréger ainsi la partie dévastatrice de Sa mission. Les dirigeants impies, rois et présidents, rendus orgueilleux par leurs atouts matériels -richesse et éducation- et par l'augmentation du nombre de leurs sujets, en viennent toujours à déployer leur puissance militaire pour accabler les innocents. A l'époque où Sri Krsna était Lui-même présent sur terre, de tels dirigeants pullulaient à la surface du globe, si bien qu'Il Se fit l'artisan de la Bataille de Kuruksetra. Lorsqu'Il révéla Sa visva-rupa, le Seigneur expliqua Sa mission dévastatrice en ces termes: "De Mon plein gré, Je suis descendu sur terre sous la forme du temps inexorable afin de diminuer le nombre des indésirables. En dehors de vous, les Pandavas, ils périront tous, guerriers des deux armées qui s'affrontent. Le châtiment n'attendra pas ta participation; tous, par Mon ordre, se trouvent déjà anéantis. Si tu veux la gloire d'être le héros de cette bataille et gagner l'enjeu de la guerre, ô Savyasaci, alors deviens, dans cette lutte, la cause immédiate de la victoire, et laisse les hommes t'en attribuer le mérite. J'ai déjà mis à mort tous les guerriers valeureux, Drona, Bhisma, Jayadratha, Karna et les autres grands généraux. N'aie nulle crainte. Combats et tu seras célébré comme un grand héros." (B.g.,XI.32-34) Le Seigneur désire toujours voir Son dévot devenir le héros de quelque exploit accompli par Lui-même. C'est ainsi qu'Il voulut faire d'Arjuna, Son dévot et ami, le héros de la Bataille de Kuruksetra; et voilà la raison pour laquelle Il attendit que tous les mécréants du monde se rassemblent en un même lieu. Là réside la seule et unique raison de Son attente.
ajasya janmotpatha-nasanaya
karmany akartur grahanaya pumsam nanv anyatha ko rhati deha-yogam paro gunanam uta karma-tantram
Isvarah paramah krsnah sac-cid ananda-vigrahah:(1) la Forme du Seigneur est éternelle, omnisciente et toute de félicité. Ce qu'on peut appeler Sa "naissance" n'en est une qu'en apparence, comme celle du soleil à l'horizon. Il ne naît pas comme un être ordinaire, sous l'influence de la nature matérielle et de l'enchaînement aux suites d'actes passés. Les Paroles et les Activités du Seigneur constituent des Divertissements absolus, autonomes, qui ne peuvent être sujets à aucune suite matérielle. Ce que confirme la Bhagavad-gita (IV.14):
Les Activités du Seigneur doivent être reconnues et appréciées de tous les êtres vivants, car elles ont pour but d'attirer l'âme distincte vers Sa Personne. Le Seigneur favorise toujours Ses dévots, et Le voyant ainsi protéger ceux qui Le servent, les hommes ordinaires -ceux qui se vouent à l'action intéressée ou recherchent le salut- peuvent fort bien être attirés vers Lui. Ceux qui se donnent à l'action intéressée pourront atteindre leurs buts s'ils servent le Seigneur avec dévotion, et il en sera de même pour les hommes en quête de salut. Mais les véritables bhaktas n'aspirent ni aux fruits de leurs actes ni à aucune forme de libération. Ils goûtent simplement les glorieuses Activités surhumaines du Seigneur, comme lorsqu'Il soulève la colline Govardhana, ou fait périr dans Sa prime enfance l'asura Putana, etc. Il accomplit ces Divertissements afin de fasciner tous les hommes -karmis, jnanis et bhaktas. Parce qu'Il transcende les lois du karma, Il ne saurait être conditionné par une forme dite maya, comme celles que doivent revêtir les êtres ordinaires, liés par leurs propres actes et par leurs conséquences. Deuxième raison de Son avènement: Il vient détruire les asuras rebelles et mettre un terme à l'absurdité de la propagande athée issue d'hommes de moindre intelligence. Mais les asuras qui sont tués par le Seigneur obtiennent ainsi le salut; telle est Sa miséricorde sans cause. Retenons que l'avènement du Seigneur auquel s'attache un sens profond, se distingue toujours d'une naissance ordinaire. Les purs bhaktas n'ont eux-mêmes aucun rapport avec le corps de matière: que dire dès lors du Seigneur, qui Se manifeste tel qu'Il est, dans Sa Forme sac-cid-ananda. Il ne peut en aucun cas être limité par une forme matérielle.
(1) B.s.,5.1
tasya prapannakhila-lokapanam
avasthitanam anusasane sve arthaya jatasya yadusv ajasya vartam sakhe kirtaya tirtha-kirteh
Il existe d'innombrables dirigeants sur les diverses planètes qui peuplent l'univers: le deva-maître du soleil et celui de la lune, Indra sur les planètes édéniques, Vayu, Varuna, ainsi que ceux qui se trouvent sur Brahmaloka, la planète où vit Brahma. Tous sont d'obéissants serviteurs du Seigneur, et chaque fois que survient quelque trouble dans l'administration des innombrables planètes des différents univers, ces dirigeants prient afin qu'intervienne le Seigneur. Et c'est alors que Celui-ci descend en ce monde, comme l'a déjà confirmé le Srimad-Bhagavatam (1.3.28) dans le verset suivant:
Le but des pèlerinages est de se rappeler Dieu sans cesse; aussi qualifie-t-on le Seigneur de tirtha-kirti. Si l'on se rend en un lieu de pèlerinage, c'est pour avoir l'occasion de glorifier le Seigneur. Même de nos jours, bien que tout ait changé, il existe encore de nombreux pèlerinages en Inde. Par exemple, à Mathura et à Vrndavana, où nous avons eu la fortune d'habiter, les gens se lèvent tôt le matin, vers quatre heures, et jusqu'au soir ils consacrent tout leur temps à louer d'une manière ou d'une autre les gloires absolues du Seigneur. La beauté de tels lieux de pèlerinage tient à ce que l'on s'y rappelle sans effort les saintes gloires de Krsna. Son Nom, Sa Renommée, Ses Attributs, Sa Forme, Ses Divertissements et Son Entourage sont tous identiques à Sa Personne, si bien que le chant des gloires du Seigneur a pour effet d'invoquer Sa présence personnelle. En quelque lieu et à quelque moment que se réunissent les purs bhaktas pour chanter les gloires du Seigneur, Celui-ci Se trouve présent, sans le moindre doute. Le Seigneur affirme d'ailleurs Lui-même qu'Il demeure toujours là où Ses purs dévots chantent Ses gloires. (1) "Tous ces avataras sont ou bien des émanations plénières du Seigneur, ou bien des émanations de ces émanations plénières, mais Sri Krsna est Lui-même Dieu, le Seigneur Suprême dans Sa Forme primordiale. Chaque fois qu'en quelque endroit de l'univers les asuras sèment le désordre, le Seigneur apparaît pour protéger Ses dévots." Ainsi s'achèvent les enseignements de Bhaktivedanta sur le premier chapitre du troisième Chant du Srimad-Bhagavatam, intitulé:- "Les questions de Vidura".
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |