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VERSET 1
Le Seigneur bienheureux dit :
Il est le sannyasi, le vrai yogi, celui qui s'acquitte de ses devoirs sans attachement aucun pour les fruits de ses actes, et non celui qui n'allume pas de feu, qui se retranche de l'action.



VERSETS 2-5
Sache-le, ô fils de Pandu : il est dit qu'on ne peut séparer le yoga, la communion avec l'Absolu, du renoncement,car sans abandonner tout désir de jouissance matérielle, nul ne peut devenir un yogi. Par l'action progresse le néophyte qui emprunte la voie du yoga en huit phases, alors qu'il s'agit, pour le parfait yogi, de cesser toute action matérielle. C'est ce qui fut établi. Il sera nommé du nom de parfait yogi, celui qui, ayant rejeté tout désir matériel, n'agit plus pour le plaisir des sens, ni pour jouir du fruit de ses actes. Le mental peut être ami de l'âme conditionnée, comme il peut être son ennemi. L'homme doit s'en servir pour s'élever, non pour se dégrader.



VERSET 6
De celui qui l'a maîtrisé, le mental est le meilleur ami ; mais pour qui a échoué dans l'entreprise, il devient le pire ennemi.



VERSET 7
Qui a maîtrisé le mental, et ainsi gagné la sérénité, a déjà atteint l'Ame Suprême. La joie et la peine, le froid et la chaleur, la gloire et l'opprobre, il les voit d'un même oeil.



VERSET 8
On appelle yogi, âme réalisée, l'être à qui la connaissance spirituelle et la réalisation de cette connaissance donnent la plénitude. Il a atteint le niveau spirituel et possède la maîtrise de soi. D'un oeil égal il voit l'or, le caillou et la motte de terre.



VERSETS 9-10
Plus élevé encore, celui qui voit d'un oeil égal l'indifférent, l'impartial, le bienfaiteur et l'envieux, l'ami et l'ennemi, le vertueux et le pécheur. Le yogi doit toujours s'astreindre de fixer son mental sur l'Etre Suprême. Il lui faut vivre en un lieu solitaire, toujours rester maître de son mental, libre de tout désir et de tout sentiment de possession.



VERSETS 11-12
En un lieu saint et retiré, il doit se ménager, ni trop haut, ni trop bas, un siège d'herbe kusa, recouvert d'une peau de daim et d'un linge d'étoffe douce. Là, il doit prendre une assise ferme, pratiquer le yoga en maîtrisant le mental et les sens, fixer ses pensées sur un point unique, et ainsi purifier son coeur.



VERSETS 13-14
Le corps, le cou et la tête droits, le regard fixé sur l'extrémité du nez, le mental en paix, maîtrisé, affranchi de la peur, ferme dans le voeu de continence, il doit alors méditer sur Moi en son coeur, faisant de Moi le but ultime de sa vie.



VERSET 15
Ainsi, par la maîtrise du corps, par celle du mental et de l'acte, le yogi, soustrait à l'existence matérielle, atteint Ma demeure [le Royaume spirituel].



VERSET 16
Nul ne peut, ô Arjuna, devenir un yogi s'il mange trop, mais aussi trop peu, s'il dort trop, mais aussi trop peu.



VERSETS 17-23
Qui garde la mesure dans le manger et le dormir, dans le travail et la détente peut, par la pratique du yoga, adoucir les souffrances de l'existence matérielle, Quand, par la pratique, le yogi parvient à régler les activités de son mental, quand affranchi de tout désir matériel, il atteint l'Absolu, on le dit établi dans le yoga. Maître du mental, le yogi demeure ferme dans sa méditation sur l'Etre Suprême, tel une flamme qui, à l'abri du vent, point ne vacille. L'être connaît la perfection du yoga, le samadhi, lorsque, par la pratique, il parvient à soustraire son mental de toute activité matérielle. Alors, une fois le mental purifié, il réalise son identité véritable et goûte la joie intérieure. En cet heureux état, il jouit, à travers ses sens purifiés, d'un bonheur spirituel infini. Cette perfection atteinte, l'âme sait que rien n'est plus précieux, et ne s'écartera pas de la vérité, mais y demeurera, imperturbable, même au coeur des pires difficultés. Telle est la vraie libération de toutes les souffrances nées du contact avec la matière.



VERSET 24
Une foi et une détermination inébranlables doivent accompagner cette pratique du yoga. Le yogi doit se défaire sans réserve de tous les désirs matériels engendrés par le faux ego et ainsi, par le mental, maîtriser la totalité des sens.



VERSETS 25-26
Animé d'une ferme conviction, il doit s'élever progressivement, par l'intelligence, jusqu'à la parfaite concentration, et ainsi fixer son mental sur l'Etre Suprême, sans plus penser à rien d'autre. Oú qu'il soit emporté par sa nature fébrile et inconstante, il faut certes ramener le mental sous le contrôle du moi spirituel.



VERSETS 27-28
Le yogi dont le mental est absorbé en Moi connaît sans conteste le bonheur ultime. Ayant saisi qu'il participe de l'Absolu, il est déjà libéré ; serein est son mental, apaisées ses passions. Il est délivré de tout péché. Etabli dans la réalisation spirituelle, purifié de toute souillure matérielle, le yogi jouit du bonheur suprême que procure l'union constante avec l'Absolu.



VERSET 29
Le vrai yogi Me voit en tous les êtres et tous les être en Moi. En vérité, l'âme réalisée Me voit partout.



VERSET 30
Qui me voit partout et voit tout en Moi n'est jamais séparé de Moi, comme jamais non plus Je ne Me sépare de lui.



VERSET 31
Le yogi Me sachant Un avec l'Ame Suprême, sis en la multiplicité des êtres, M'adore et en Moi toujours demeure.



VERSET 32
Le parfait yogi, ô Arjuna, voit, à travers sa propre expérience, l'égalité de tous les êtres, heureux ou malheureux.



VERSET 33
Arjuna dit :
Ce yoga que Tu as décrit en peu de mots, ô Madhusudana, je ne vois point comment le mettre en pratique, car le mental est capricieux et instable.



VERSET 34
Le mental, ô Krsna, est fuyant, fébrile, puissant et tenace; le subjuguer me semble plus ardu que maîtriser le vent.



VERSET 35
Le Seigneur bienheureux dit:
O Arjuna aux-bras-puissants, il est certes malaisé de dompter ce mental fébrile. On y parvient cependant, ô fils de Kunti, par une pratique constante et par le détachement.



VERSET 36
Pour qui n'a pas maîtrisé son mental, l'oeuvre de réalisation spirituelle sera difficile. Mais pour qui le domine et guide ses efforts par les moyens appropriés, la réussite est sûre. Telle est Ma pensée.



VERSET 37
Arjuna dit :
Celui qui, après avoir emprunté avec foi le sentier du yoga, l'abandonne, pour n'avoir pas su détacher du monde son mental, et qui, par suite, n'atteint pas la perfection spirituelle, ô Krsna, quel est son destin ?



VERSETS 38-39
Se détournant ainsi du chemin de la réalisation spirituelle, ô Krsna au-bras-puissant, ne périt-il pas, comme un nuage se dissipe, privé de tout refuge ? En ce point gisent mes doutes, ô Krsna ; veuille, je T'en prie, les dissiper complètement, car nul autre que Toi ne le peut.



VERSETS 40-41
Le Seigneur bienheureux dit :
O fils de Prtha, pour le spiritualiste aux actes heureux, il n'est de destruction ni dans cette vie, en ce monde, ni dans l'autre ; jamais, Mon ami, le mal, ou l'infortune, ne s'empare de lui. Après des années sans nombre de délice sur les planètes oú vivent ceux qui ont pratiqué le bien, celui qu'a vu faillir la voie du yoga renaît au sein d'une famille riche et noble, ou vertueuse.



VERSETS 42-47
Il peut aussi renaître dans une famille de sages spiritualistes. En vérité, il est rare, ici-bas, d'obtenir une telle naissance. Là, ô fils de Kuru, il recouvre la conscience divine acquise dans sa vie passée, et reprend sa marche vers la perfection. En vertu de la conscience divine acquise dans sa vie passée, il est tout naturellement porté vers la pratique du yoga, parfois même à son insu. Désireux de connaître le yoga, il transcende déjà tous les rites scriptuaires. Que le yogi, purifié de toute faute, s'efforce de parfaire sa réalisation spirituelle, et il atteindra enfin, passées de nombreuses vies d'intense pratique, le but suprême. Le yogi est plus haut que l'ascète, le philosophe et l'homme qui aspire aux fruits de ses actes. En toutes circonstances, sois donc un yogi, ô Arjuna. Et de tous les yogis, celui qui, avec une foi totale, demeure toujours en Moi et M'adore en Me servant avec amour, celui-là est le plus grand, et M'est le plus intimement lié.

FIN DU SIXIÈME CHAPITRE