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Dix-septième chapitre.

Les branches de la foi.




 

VERSET 1

 

arjuna uvaca
ye shastra-vidhim utsrjya
yajante shraddhayanvitah
tesham nistha tu ka krishna
sattvam aho rajas tamah

 

TRADUCTION

Arjuna dit: Quant à ceux qui ne suivent pas les principes des Ecritures, mais se vouent à un culte de leur invention, quelle est leur condition, ô Krsna? Est-ce celle de la vertu, de la passion ou de l'ignorance?

 

TENEUR ET PORTEE

Le trente-neuvième verset du quatrième chapitre enseignait que l'homme de foi, s'il se donne à une forme particulière d'adoration, se voit graduellement élevé au niveau de la connaissance, et atteint par là les sommets de la paix et de la prospérité. Le seizième chapitre concluait par ailleurs que celui qui omet de suivre les principes établis par les Ecritures doit être tenu pour un asura, par opposition à celui qui les observe avec foi, le deva. Quelle est alors la condition de celui qui suit avec foi un principe, des règles, mais dont les Ecritures ne font pas mention? Krsna entend dissiper le doute qu'Arjuna formule ainsi. L'adoration de qui se fabrique un Dieu à partir d'un homme quelconque, devenu objet de sa foi, relève-t-elle de la vertu, de la passion ou de l'ignorance? Par elle, peut-on atteindre la perfection de l'existence? Connaissent-ils le succès, ceux qui ne suivent pas les principes ni les règles des Ecritures, mais ont foi en quelque chose, deva ou homme, dont ils font encore l'objet de leur adoration? Voici les questions qu'Arjuna pose à Krsna.

 


VERSET 2

 

sri-bhagavan uvaca
tri-vidha bhavati shraddha
dehinam sa svabhava-ja
sattviki rajasi caiva
tamasi ceti tam shrinu

 

TRADUCTION

Le Seigneur Bienheureux dit: Selon la nature des influences matérielles [gunas] reçues par l'être incarné, sa foi peut appartenir à trois ordres: la vertu, la passion ou l'ignorance. Entends là-dessus Ma parole.

 

TENEUR ET PORTEE

Les hommes qui, ayant connaissance des principes régulateurs énoncés dans les Ecritures, cessent de les observer, par paresse ou par indolence, passent sous la tutelle des trois gunas. Selon que leurs actes antérieurs ont relevé de la vertu, de la passion ou de l'ignorance, ils acquièrent une nature, un caractère particulier. Dès le premier instant où il entre en contact avec la nature matérielle, l'être vivant ne cesse d'être aux prises avec les gunas. De la sorte, il revêt, selon leur influence spécifique, un caractère, une mentalité particulière. Cette mentalité, il lui est possible toutefois de la modifier, en approchant un maître spirituel authentique et en vivant selon ses préceptes et les enseignements des Ecritures. Graduellement, il pourra ainsi passer de l'ignorance, ou de la passion, à la vertu. En conclusion, une foi aveugle, prise dans la sphère d'un guna particulier, n'est d'aucun recours à qui veut s'élever jusqu'à la perfection. Car il faut encore considérer les choses avec attention, avec intelligence, en la compagnie d'un maître spirituel authentique. C'est seulement ainsi qu'on peut progresser vers un guna plus élevé.

 


VERSET 3

 

sattvanurupa sarvasya
shraddha bhavati bharata
shraddha-mayo ’yam purusho
yo yac-chraddhah sa eva sah

 

 

TRADUCTION

Selon quel guna marque son existence, l'être développe une foi particulière, ô Bharata. On le dit de foi telle ou telle, selon qu'il baigne en l'un ou l'autre.

 

TENEUR ET PORTEE

Il n'est personne, peu importe sa condition, qui ne possède une forme quelconque de foi. Mais cette foi devient vertueuse, passionnée ou ignorante selon la nature acquise, au contact des gunas, par l'homme qu'elle anime. Ainsi, selon la nature de sa foi, on recherchera la compagnie de tel ou tel genre d'homme. Cependant, la vérité est tout autre: chaque être vivant, comme l'enseigne le quinzième chapitre, constitue originellement un fragment, une partie intégrante du Seigneur Suprême, au-delà, donc, de toute influence des gunas. Mais qu'il oublie sa relation avec Dieu, la Personne Suprême, qu'il entre en contact avec la nature matérielle, qu'il pénètre dans l'existence conditionnée, alors il y détermine sa propre condition par la manière dont il touche aux différentes formes et facettes de la nature matérielle. La foi et le mode d'existence qui résultent de ce conditionnement ne sauraient être que matériels, artificiels. Bien que l'être conditionné perçoive la vie d'une certaine manière, qu'il en possède une conception matérielle, qui le pousse à agir de telle ou telle façon, il demeure, par nature, nirguna, au delà de la matière. Aussi lui faut-il, afin de retrouver sa relation avec le Seigneur Suprême, se purifier de la souillure matérielle qui l'a recouvert. Et la seule voie qui le lui permette sans crainte aucune est la conscience de Krsna. L'être établi dans la conscience de Krsna s'élève sans nul doute à la perfection. Mais celui qui n'emprunte pas cette voie de réalisation spirituelle devra sans nul doute vivre sous la conduite des trois gunas.

Le mot sraddha, ou foi, est, ici, particulièrement significatif. En effet, la sraddha, la foi, ressort toujours des actes accomplis sous le signe de la vertu. Que la foi se place en un deva, en un Dieu fictif ou en quelque création mentale, c'est elle qui, généralement, lorsqu'elle s'est affermie, engendre les actes de vertu. Sachons, cependant, que nulle œuvre accomplie dans l'existence conditionnée, au sein de la nature matérielle, n'est tout à fait pure. Nulle œuvre ne peut y appartenir à la seule vertu: elle doit être teintée d'autres gunas. La pure vertu, en effet, transcende la nature matérielle, et celui qui s'y établit peut comprendre la vraie nature de Dieu, la Personne Suprême. Tant que la foi ne relève pas de cette vertu entièrement pure, elle se trouve promise à la souillure des gunas, qui étendent leur impureté jusqu'au coeur. Aussi est-ce la façon dont le coeur entre en contact avec un guna particulier qui détermine l'aspect de la foi. De fait, comprenons que la foi d'un homme dont le coeur est touché par la vertu baignera elle-même dans la vertu. Semblablement, celui dont le coeur est dans la passion, sa foi baignera dans la passion; et celui dont le coeur est dans les ténèbres de l'ignorance, dans l'illusion, sa foi devra en subir la souillure. On trouvera donc différentes sortes de foi en ce monde, et différentes sortes de religions correspondantes. Le véritable principe de la foi religieuse, cependant, se situe dans la vertu pure, et c'est seulement parce que le coeur des êtres est teinté des autres gunas qu'existe une multiplicité de fois, de religions, et en rapport avec elle, différentes formes d'adoration.

 


VERSET 4

 

yajante sattvika devan
yaksha-rakshamsi rajasah
pretan bhuta-ganams canye
yajante tamasa janah

 

TRADUCTION

Les hommes que gouverne la vertu vouent leur culte aux devas, ceux que domine la passion, aux êtres démoniaques, et ceux qu'enveloppe l'ignorance vivent dans le culte des fantômes et autres esprits.

 

TENEUR ET PORTEE

Dans ce verset, Dieu, la Personne Suprême, décrit diverses sortes d'adorateurs, classés d'après leur comportement. Les Ecritures enseignent que seul le Seigneur Suprême est digne d'adoration, mais les hommes sans grande connaissance des préceptes scripturaires, ou privés de foi en eux, adorent divers objets, que détermine la façon particulière dont ils subissent l'influence des gunas. Ceux que gouverne la vertu adorent généralement les devas, c'est à dire Brahma, Siva, et d'autres, multiples, tels qu'Indra, Candra et Vivasvan, le deva du soleil. Ils font acte d'adoration pour l'un d'eux en particulier, selon le but qu'ils désirent atteindre. De même, ceux que domine la passion vouent leur adoration aux êtres démoniaques. Nous nous souvenons, à ce propos, d'un homme de Calcutta qui, durant la seconde guerre mondiale, rendait un culte à Hitler, lequel lui avait permis, en provoquant la guerre, d'amasser une grosse fortune au marché noir. Comme lui, ceux qu'enveloppent passion et ignorance choisissent en général de prendre pour Dieu un homme chargé de pouvoir. Ils croient que n'importe qui peut être adoré comme Dieu sans que les fruits de l'adoration changent de nature.

A partir de notre verset, il est donc clair que les hommes dominés par la passion créent et adorent de semblables "dieux", tandis que l'ignorance pousse les êtres qu'elle enveloppe de ses ténèbres à adorer les morts et les esprits. Parfois, ils font leur adoration sur la tombe de quelque disparu. Dans l'ignorance ténébreuse également trouve place le culte du sexe. On voit aussi en Inde, en des villages reculés, des gens qui adorent les spectres. Nous y avons nous-mêmes constaté que les gens ignorants se rendent parfois dans la forêt pour adorer un arbre où ils savent que vit un spectre, et y accomplir des sacrifices. On ne peut certes assimiler ces actes à l'adoration de Dieu. L'adoration de Dieu est le destin des êtres qui, au-delà des gunas, se sont établis dans la vertu pure. Le Srimad-Bhagavatam enseigne:

"Quand un homme est établi dans la vertu pure, il adore Vasudeva. "

Ce qui signifie profondément que l'être entièrement lavé de la souillure des gunas, et capable de les transcender, voue son adoration à Dieu, la Personne Suprême.

Les impersonnalistes se trouvent, dit-on, gouvernés par la vertu, et ils adorent cinq différents devas. Ils vouent encore leur adoration au Visnu "impersonnel", ou la forme de Visnu dans l'univers matériel, qu'on appelle le Visnu "philosophé". Visnu est une manifestation du Seigneur Suprême, mais puisque les impersonnalistes refusent de croire en Dieu, la Personne Suprême, ils s'imaginent que la Forme de Visnu ne constitue qu'un autre aspect du Brahman impersonnel; et de la même manière, que Brahma représente la forme du même Brahman impersonnel, mais sous l'aspect de la passion. Il arrive donc qu'ils décrivent cinq sortes de dieux adorables, mais parce qu'ils croient que le Brahman impersonnel est l'unique vérité, ils se défont, à la fin, de tout objet d'adoration. Concluons en disant qu'on ne pourra s'affranchir des différentes influences des gunas qu'au contact d'êtres qui les ont déjà transcendées.

 


VERSET 5-6

 

ashastra-vihitam ghoram
tapyante ye tapo janah
dambhahankara-samyuktah
kama-raga-balanvitah

karsayantah sarira-stham
bhuta-gramam acetasah
mam caivantah sarira-stham
tan viddhy asura-niscayan

 

TRADUCTION

Les hommes qui s'imposent des austérités sévères, mais non conformes aux Ecritures, s'y livrant par orgueil, égotisme, concupiscence et attachement, poussés pas la passion, et qui torturent ainsi leur corps, sans comprendre, dans leur inconscience, qu'ils Me torturent aussi, Moi, l'Ame Suprême, sise en eux, ceux-là, sache-le, sont des asuras.

 

TENEUR ET PORTEE

On voit des hommes qui inventent leur propre mode d'austérité, de pénitence, sans s'inquiéter que les Ecritures n'en fassent pas même la mention. Par exemple, jeûner pour servir une fin purement matérielle, politique ou autre. Les Ecritures, en effet, recommandent le jeûne qui sert l'avancement spirituel, à l'exclusion de celui dont le but est politique ou social. Selon la Bhagavad-gita, les hommes qui se livrent à de telles austérités, non confirmées par les Ecritures, sont certes démoniaques. Leurs actes vont à l'encontre des préceptes scripturaires et n'apportent rien à l'humanité en général. Au fond, ils demeurent motivés par l'orgueil, le faux ego, la concupiscence et l'attachement aux plaisirs matériels. Ces actes perturbent non seulement l'ordre des éléments matériels qui constituent le corps, mais aussi le Seigneur Suprême, vivant en personne à l'intérieur du corps. Ces jeûnes et austérités non autorisés, accomplis à quelque fin politique, constituent également, sans nul doute, une grande source de gêne pour autrui. Répétons-le, on ne les trouve nulle part mentionnés dans les Textes védiques. L'homme démoniaque peut croire que par ces méthodes il forcera son ennemi, ou les partis opposés, de se rendre à ses désirs, mais nous voyons également qu'elles peuvent parfois le conduire à la mort. Ces actes, ces pratiques, ne reçoivent pas l'approbation de Dieu, lequel, au contraire, enseigne même à voir en ceux qui s'y adonnent des êtres démoniaques. Ils constituent en fait une insulte envers le Seigneur, puisqu'ils vont à l'encontre des lois énoncées dans les Textes védiques. Remarquons à ce propos le mot acetasah: il marque que les hommes dont le mental est sain obéiront aux règles des Ecritures, tandis que ceux qui ne jouissent pas d'un tel état mental négligeront les Ecritures, et leur désobéiront en inventant leur propre mode d'ascèse et de pénitence. Il faut toujours garder à l'esprit le destin de ces démoniaques, tel qu'il est décrit dans le chapitre précédent. Le Seigneur les force à renaître dans le sein de quelque autre être démoniaque, et donc à vivre existence après existence selon des principes démoniaques, en ignorant tout de leur relation avec Dieu, la Personne Suprême. Si, toutefois, ils sont assez heureux pour se voir guidés par un maître spirituel vers la voie de la sagesse védique, alors ils pourront sortir de leur engluement et finir par atteindre le but suprême.

 


VERSET 7

 

aharas tv api sarvasya
tri-vidho bhavati priyah
yajnas tapas tatha danam
tesham bhedam imam shrinu

 

TRADUCTION

Les aliments chers à chacun se divisent aussi en trois ordres, qui correspondent aux trois gunas. De même pour le sacrifice, l'austérité, la charité. Ecoute, et Je t'enseignerai ce qui les distingue.

 

TENEUR ET PORTEE

On trouvera, correspondant aux différentes influences des gunas, diverses manières de manger, d'accomplir des sacrifices, de pratiquer des austérités, de faire la charité. De même, elles ne se situent pas toutes à un même niveau. Celui qui peut comprendre, par voie analytique, lesquelles relèvent d'un guna ou d'un autre, celui-là est le vrai sage, au contraire des sots, de ceux qui ne savent pas distinguer les diverses formes de nourriture, sacrifice ou charité. On trouve toujours des "missionnaires" pour enseigner qu'en agissant comme bon lui semble, n'importe qui peut atteindre la perfection. Mais ces guides, sans intelligence, vont à l'encontre des sastras. Ils fabriquent de toutes pièces des voies d'agir et égarent ainsi les foules.

 


VERSET 8/10

 

ayuh-sattva-balarogya
sukha-priti-vivardhanah
rasyah snigdhah sthira hrdya
aharah sattvika-priyah

katv-amla-lavanaty-usna
tiksna-ruksa-vidahinah
ahara rajasasyesta
duhkha-sokamaya-pradah

yata-yamam gata-rasam
puti paryusitam ca yat
ucchistam api camedhyam
bhojanam tamasa-priyam

 

TRADUCTION

Les aliments de la vertu purifient l'existence et en prolongent la durée; ils procurent force, santé, joie et satisfaction. Ces aliments substantiels sont doux, juteux, gras et pleins de saveur. Les aliments trop amers, acides, salés, piquants, secs ou chauds, sont aimés de ceux que domine la Passion. Ils engendrent souffrance, malheur et maladie. Et chers aux hommes qu'enveloppe l'ignorance, les aliments cuits plus de trois heures avant d'être consommés, les aliments privés de goût, de fraîcheur, malodorants, décomposés ou impurs, voire les restes.

 

TENEUR ET PORTEE

Les seules fonctions de la nourriture sont d'accroître la longévité, de purifier le mental et de donner au corps santé et vigueur. De grandes autorités en la matière ont choisi, dans le passé, les aliments qui servent le mieux ces fonctions, et qui sont, entre autres, les produits laitiers, le sucre, le riz, le blé, les fruits, les légumes. Ces aliments sont chers aux hommes que gouverne la vertu. D'autres, tels que le mais ou la mélasse, bien que pas très savoureux en eux-mêmes, peuvent le devenir une fois mélangés à du lait ou à d'autres aliments de la vertu, et ainsi rejoindre le cercle de la vertu.

Tous ces aliments sont naturellement purs; ils s'éloignent fort des choses "intouchables", impures, comme la viande et les liqueurs. Les aliments gras que mentionne le verset huit ne sauraient de même avoir aucun lien avec la graisse fournie par l'abattage des animaux. Les graisses animales sont disponibles dans le lait, qui se trouve être le plus merveilleux de tous les aliments. Le lait, le beurre, le fromage et autres produits semblables donnent des graisses animales sous une forme qui exclut toute nécessité de tuer d'innocentes créatures. Seule une mentalité barbare permet que se poursuive l'abattage des animaux. La seule manière civilisée d'obtenir les matières grasses nécessaires à l'homme est de les puiser dans le lait. L'abattage des animaux est la façon propre à l'infra-humain. Quant aux protéines, on les trouvera amplement dans les pois cassés, le dal, le blé complet, etc.

Les aliments de la passion, amers, trop salés, trop chauds, ou trop épicés de piment rouge, engendrent la souffrance, car ils produisent une surabondance de mucus dans l'estomac, source de maladie.

Les aliments marqués par l'ignorance ténébreuse sont pour l'essentiel ceux qui ne sont pas frais. Tout aliment cuit plus de trois heures avant la consommation appartient aux ténèbres de l'ignorance (exception faite du prasada, la nourriture d'abord offerte au Seigneur). Parce qu'en décomposition, ces aliments font naître de mauvaises odeurs, qui souvent attirent les hommes enveloppés d'ignorance, mais repoussent toujours ceux que gouverne la vertu.

Les reliefs de nourriture ne peuvent être consommés que lorsqu'ils proviennent d'un repas d'abord offert au Seigneur Suprême ou à des saints hommes, notamment le maître spirituel. Sinon, tous restes de nourriture relèvent de l'ignorance, et ne font que répandre l'infection et la maladie. De tels aliments, bien qu'extrêmement agréables aux hommes qu'enveloppe l'ignorance, n'attirent jamais les hommes que gouverne la vertu, qui n'y toucheraient même pas. Mais la meilleure nourriture est celle que l'on offre d'abord à Dieu, au Seigneur Suprême, lequel enseigne dans la Bhagavad-gita que si on les Lui offre avec dévotion, Il accepte les mets préparés à partir de légumes, de farine, de lait. Bien entendu, l'amour et la dévotion accompagnant l'offrande sont, pour le Seigneur, les ingrédients les plus importants; mais le prasada n'en requiert pas moins une préparation particulière. D'autre part, tout aliment ainsi préparé, en accord avec ce qu'enseignent les Ecritures à ce sujet, et ensuite offert à Dieu, la Personne Suprême, peut être honoré même très longtemps après qu'il ait été cuisiné, car un tel aliment est purement spirituel. C'est pourquoi si l'on désire rendre les aliments purs, "comestibles" et succulents pour tous, on doit d'abord les offrir à Dieu, la Personne Suprême.


 
VERSET 11

 

aphalakanksibhir yajno
vidhi-disto ya ijyate
yastavyam eveti manah
samadhaya sa sattvikah

 

TRADUCTION

Parmi les sacrifices, celui qu'on accomplit par devoir, selon les règles des Ecritures, et sans en attendre aucun fruit pour soi-même, appartient à la vertu.

 

TENEUR ET PORTEE

Quand les gens offrent des sacrifices, c'est en général poussés par quelque motivation personnelle; notre verset affirme au contraire que le sacrifice doit être accompli sans aucun désir propre, qu'il doit être accompli par devoir. Prenons l'exemple des rites pratiqués dans les temples ou dans les églises; ils sont en général motivés par le désir de quelque avantage matériel, et ne sauraient donc relever de la vertu. Il faut au contraire aller au temple ou à l'église par devoir, y rendre son hommage à Dieu, la Personne Suprême, et Lui offrir des fleurs, de la nourriture... Tous croient, cependant, qu'il est vain de ne se rendre au temple que pour adorer Dieu. Rappelons-leur que l'adoration visant à obtenir des biens matériels n'est aucunement recommandée dans les Ecritures. Il faut se rendre au temple à seule fin d'offrir ses respects à la murti. De cette manière, on se trouvera situé dans la vertu. Il va du devoir de tout homme civilisé d'obéir aux lois qu'énoncent les Ecritures, et d'offrir son respect au Seigneur Suprême.

 


VERSET 12

 

abhisandhaya tu phalam
dambhartham api caiva yat
ijyate bharata-srestha
tam yajnam viddhi rajasam

 

TRADUCTION

Mais le sacrifice accompli en vue de quelque résultat ou bienfait matériel, ou d'une manière ostentatoire, par orgueil, sache qu'il naît de la passion, ô meilleur des Bharatas.

 

TENEUR ET PORTEE

Sacrifices et rites sont parfois accomplis dans le but d'être promu sur les planètes édéniques ou d'obtenir, en ce monde, quelque bienfait matériel. De tels sacrifices ou rites sont dits naître de la passion.

 


VERSET 13

 

vidhi-hinam asrstannam
mantra-hinam adaksinam
shraddha-virahitam yajnam
tamasam paricakshate

 

 

TRADUCTION

Quant au sacrifice accompli sans foi aucune et hors des préceptes scriptuaires, oú nulle nourriture consacrée n'est distribuée, nul hymne chanté, où les prêtres ne reçoivent aucun don en retour, il est dit relever de l'ignorance.

 

TENEUR ET PORTEE

La foi qui relève des ténèbres de l'ignorance s'avère en fait ne pas être une véritable foi. Certains adorent quelque deva dans le seul but de gagner de l'argent, qu'ils dépensent ensuite pour leur bon plaisir, négligeant les préceptes scripturaires. Ne voyons là que de cérémonieuses démonstrations de piété, qui ne sauraient être tenues pour vraies. Elles baignent toutes dans les ténèbres de l'ignorance; elles engendrent une mentalité démoniaque et ne sont d'aucun bien pour l'humanité. La foi qui relève des ténèbres de l'ignorance s'avère en fait ne pas être une véritable foi. Certains adorent quelque deva dans le seul but de gagner de l'argent, qu'ils dépensent ensuite pour leur bon plaisir, négligeant les préceptes scripturaires. Ne voyons là que de cérémonieuses démonstrations de piété, qui ne sauraient être tenues pour vraies. Elles baignent toutes dans les ténèbres de l'ignorance; elles engendrent une mentalité démoniaque et ne sont d'aucun bien pour l'humanité.

 


VERSET 14

 

deva-dvija-guru-prajna-
pujanam shaucam arjavam
brahmacaryam ahimsa ca
sariram tapa ucyate

 

TRADUCTION

Respecter le culte du Seigneur Suprême, des Brahmanas, du maître spirituel, et de tous ceux qui sont au-dessus de nous, tel le père et la mère; observer la pureté, la simplicité, la continence et la non-violence,-telles sont les austérités du corps.

 

TENEUR ET PORTEE

Le Seigneur Suprême explique ici les différentes formes d'austérité, de pénitence. Il commence par enseigner de quelle nature est l'austérité du corps. Elle consiste, entre autres, à offrir, ou apprendre à offrir son respect à Dieu, mais aussi aux devas, aux brahmanas accomplis et qualifiés, au maître spirituel, et à tous ceux qui sont au-dessus de nous, le père, la mère, ou quiconque est versé dans le savoir védique. A chacun d'eux, il faut offrir des marques appropriées de respect. Apprendre à se purifier, à l'extérieur comme à l'intérieur, devenir simple dans son comportement, voilà également des pratiques nécessaires. On ne doit jamais, par ailleurs, se livrer à un acte que n'approuvent pas les Ecritures, comme s'adonner à la vie sexuelle en dehors du mariage. Les Ecritures, en effet, ne sanctionnent la vie sexuelle que dans les cadres du mariage. C'est ce que l'on entend par "continence". Telles sont donc les austérités et les pénitences qui se rapportent au corps.

 


VERSET 15

 

anudvega-karam vakyam
satyam priya-hitam ca yat
svadhyayabhyasanam caiva
van-mayam tapa ucyate

 

TRADUCTION

User d'un langage vrai, dirigé vers le bien de tous, mais encore éviter les mots blessants, ainsi que réciter assidûment les Vedas,-telles sont les austérités du verbe.

 

TENEUR ET PORTEE

On doit se garder de toute parole qui provoque agitation dans le mental d'autrui. Un précepteur, naturellement, peut dire toute vérité qui instruira ses élèves, mais doit éviter de le faire pour d'autres si cela doit susciter l'agitation en leur mental. Tel est un aspect de l'ascèse du verbe. Mais il faut également s'abstenir de proférer des inepties. Et celui qui prend la parole dans un cercle de spiritualistes doit appuyer ses dires sur les Ecritures, qu'il citera immédiatement pour confirmer ce qu'il enseigne. Ses propos doivent aussi rester fort plaisants à l'oreille. C'est ainsi que ces échanges apportent le plus grand bienfait à celui qui y prend part, et contribuent à élever la société humaine. Les Ecritures védiques sont inépuisables, et nous devons nous absorber dans leur étude. Tout cela, donc, relève de l'ascèse du verbe.


 
VERSET 16

 

manah-prasadah saumyatvam
maunam atma-vinigrahah
bhava-samsuddhir ity etat
tapo manasam ucyate

 

TRADUCTION

Sérénité, simplicité, gravité, maîtrise de soi et pureté de la pensée,-telles sont les austérités du mental.

 

TENEUR ET PORTEE

Rendre le mental austère, c'est le détacher des plaisirs des sens. On doit le former de façon à ce qu'il pense toujours au bien d'autrui. Le mieux, pour cela, est de lui imposer la gravité de pensée, c'est-à-dire ne jamais le laisser dévier de la conscience de Krsna ou habiter les plaisirs des sens. Pour ce qui est de la pureté, sachons que se purifier au plus profond de soi consiste à devenir conscient de Krsna. La sérénité, ou satisfaction du mental, s'obtiendra seulement si l'on écarte toute pensée de jouissance matérielle. Plus nous pensons à ces jouissances, plus le mental manque sa propre satisfaction. Dans l'âge où nous vivons, les hommes absorbent vainement leurs pensées dans l'exploitation des différentes voies pour jouir des sens; aussi leur est-il impossible de connaître cette paix du mental. Le mieux sera d'orienter le mental vers les Ecrits védiques, tels que les Puranas ou le Mahabharata, qui regorgent d'histoires génératrices de satisfaction. On peut s'absorber du savoir bienfaisant qu'ils contiennent et ainsi se purifier. Le mental doit encore être libre de toute duplicité, engagé dans des pensées destinées au bien de tous, et telle est la simplicité du mental. On nomme gravité du mental, ou silence, l'absorption constante de ses pensées dans la réalisation spirituelle, et l'homme conscient de Krsna, qui observe rigoureusement cette pratique, est donc, en ce sens, parfaitement silencieux. La maîtrise du mental, d'où la maîtrise de soi, consiste à le détacher de la jouissance matérielle. Quant à la pureté du mental, comme de toute l'existence, elle procède de la droiture, d'un comportement franc et direct. Et l'ensemble de toutes ces pratiques constitue l'austérité du mental.

 


VERSET1 17

 

shraddhaya paraya taptam
tapas tat tri-vidham naraih
aphalakanksibhir yuktaih
sattvikam paricakshate

 

TRADUCTION

Pratiquée avec foi par des hommes dont le but n'est pas d'obtenir pour eux-mêmes quelque bienfait matériel, mais de satisfaire le Suprême, la triple union de ces austérités procède de la Vertu.

 


VERSET 18

 

satkara-mana-pujartham
tapo dambhena caiva yat
kriyate tad iha proktam
rajasam calam adhruvam

 

 

TRADUCTION

Quant aux pénitences ostentatoire, qui recherchent le respect, l'honneur et la vénération des hommes, on les dit appartenir à la passion. Elles ne sont qu'instables et éphémères.

 

TENEUR ET PORTEE

Austérités et pénitences sont parfois accomplies dans le but d'attirer à soi les hommes et de gagner le respect, les honneurs et l'adoration de tous. Les hommes que domine la passion prennent divers moyens afin de recevoir l'adoration de subordonnés, qu'ils laissent sans réticence laver leurs pieds et leur offrir des richesses. Et les austérités, les pénitences artificielles qu'ils accomplissent à cette fin doivent être considérées comme appartenant à la passion. On peut s'y livrer un certain temps, non en permanence; leurs fruits sont éphémères.

 


VERSET 19

 

mudha-grahenatmano yat
pidaya kriyate tapah
parasyotsadanartham va
tat tamasam udahrtam

 

TRADUCTION

Enfin, les pénitences et austérités accomplies par sottise, et faites de tortures obstinées, ou subies en vue de blesser, de détruire, on les dit issues de l'ignorance.

 

TENEUR ET PORTEE

On trouve divers exemples de pénitences insensées entreprises par des êtres démoniaques, tel celui d'Hiranyakasipu, qui les accomplit pour devenir immortel et anéantir les devas. Il pria Brahma de lui accorder ces faveurs, mais finit quand même mort, tué par le Seigneur Suprême. Entreprendre une ascèse pour atteindre l'impossible, voilà qui relève certes de l'ignorance.

 


VERSET 20

 

datavyam iti yad danam
diyate ’nupakarine
dese kale ca patre ca
tad danam sattvikam smrtam

 

TRADUCTION

La charité que dicte le devoir, faite sans rien attendre en retour, en de justes conditions de temps et de lieu, et à qui en est digne, cette charité, on la dit s'accomplir sous le signe de la vertu.

 

TENEUR ET PORTEE

Les Ecritures védiques recommandent la charité qui s'adresse aux hommes engagés dans des activités spirituelles. Nulle part elles n'appuient une charité faite sans discernement. Le but de la charité doit être la perfection spirituelle. Aussi est-il conseillé de faire la charité en un lieu de pèlerinage et lors d'une éclipse solaire ou lunaire, ou à la fin du mois, ou encore à un brahmana qualifié, à un vaisnava, ou dans un temple. De plus, on ne doit rien attendre en retour. La charité est parfois faite aux pauvres, par compassion, mais si les pauvres à qui l'on donne n'en sont pas dignes, on ne reçoit alors aucun bénéfice spirituel. En d'autres mots, la charité faite sans discernement n'est pas en accord avec les Textes védiques.


 
VERSET 21

 

yat tu pratyupakarartham
phalam uddisya va punah
diyate ca pariklistam
tad danam rajasam smrtam

 

TRADUCTION

Mais la charité qu'inspire l'espoir de récompense, ou le désir d'un fruit matériel, ou encore faite à contrecoeur, celle-là est dite appartenir à la passion.

 

TENEUR ET PORTEE

La charité est parfois faite dans le but de se promouvoir sur les planètes édéniques; elles s'accomplit parfois à grand-peine et parfois même se trouve suivie de remords: "Pourquoi ai-je ainsi tant dépensé?" Parfois encore, on la fait par obligation, à la demande d'un supérieur. Toutes ces formes de charité sont dites appartenir à la passion.

Il existe nombre de fondations charitables qui offrent leurs dons à des institutions où les plaisirs des sens sont encouragés. De tels actes de charité ne se trouvent pas recommandés dans les Ecrits védiques. Seuls le sont ceux qui relèvent de la vertu.

 


VERSET 22

 

adesa-kale yad danam
apatrebhyas ca diyate
asat-kritam avajnatam
tat tamasam udahrtam

 

TRADUCTION

Enfin, la charité qui n'est faite ni en temps ni en lieu convenables, ni a des gens qui en sont dignes, ou qui s'exerce de façon irrespectueuse et méprisante, on la dit relever de l'ignorance.

 

TENEUR ET PORTEE

Ce verset rejette les aumônes qui encouragent l'intoxication et les jeux de hasard. Elles appartiennent à l'ignorance. Non seulement une telle charité n'apporte nul bienfait, mais elle encourage même le péché et ceux qui s'y livrent. De même, si l'on fait la charité à une personne qui en est digne, mais de façon irrespectueuse, sans l'attention qui convient, cette charité est elle aussi considérée comme appartenant aux ténèbres de l'ignorance.

 


VERSET 23

 

om tat sad iti nirdeso
brahmanas tri-vidhah smrtah
brahmanas tena vedas ca
yajnas ca vihitah pura

 

 

TRADUCTION

Om tat sat, depuis les origines de la création, ces trois syllabes ont servi à désigner la Vérité Suprême et Absolue [Brahman]. Pour la satisfaction du Suprême, les brahmanas les ont prononcées lors du chant des hymnes védiques et de l'accomplissements des sacrifices.

 

TENEUR ET PORTEE

Nous avons vu que la nourriture, le sacrifice, l'austérité et la charité se divisent en trois catégories, qui correspondent à la vertu, la passion et l'ignorance. Qu'elles soient du premier, du second ou troisième ordre, toutes ces pratiques restent conditionnées, souillées par les gunas. Cependant, lorsqu'elles s'orientent vers l'Absolu -l'om tat sat, ou Dieu, la Personne Suprême, l'Eternel-, elles deviennent un moyen d'élévation spirituelle. Et cet objectif se trouve bien mentionné parmi les préceptes scripturaires. Les trois mots om tat sat indiquent spécifiquement la Vérité Absolue, Dieu, la Personne Suprême. Le mot om, par ailleurs, se retrouve constamment dans les hymnes védiques.

Celui dont les actes ne tiennent pas compte des principes des Ecritures ne parviendra jamais à la Vérité Absolue. Il atteindra quelque résultat éphémère, mais non le but réel de la vie. Le sacrifice, l'austérité et la charité doivent donc être accomplis sous le signe de la vertu, faute de quoi, si on les accomplit dans la passion ou l'ignorance, leur valeur serait fort amoindrie. Les trois mots om tat sat sont prononcés conjointement avec le Saint Nom du Seigneur Suprême. Chaque fois que l'on chante un hymne védique ou le Saint Nom du Seigneur, on y joint l'om, ce que montrent les Ecritures védiques. Ces trois mots sont tirés des hymnes védiques. Om ity etad brahmano nedistam nama indique le premier but. Tattvamasi indique le second, et sad eva saumya, le troisième. Combinés, ils deviennent om tat sat. Jadis, lorsque Brahma, le premier être créé, accomplit des sacrifices, il prononça ces trois Noms de Dieu, la Personne Suprême, et cette procédure, transmise par la succession disciplique, demeure encore. Cet hymne, donc, est chargé de sens. Aussi la Bhagavad-gita recommande-t-elle que toute œuvre soit accomplie pour l'om tat sat, pour Dieu, la Personne Suprême. Celui qui accomplit le sacrifice, l'austérité ou la charité en prononçant ces trois mots, celui-là agit dans la conscience de Krsna. La conscience de Krsna consiste en effet dans l'exécution scientifique d'activités spirituelles, exécution qui permet aux êtres de retourner à Dieu, en leur demeure première. Agir ainsi, agir au-delà des gunas, n'entraîne, d'autre part, aucune perte d'énergie.


 

VERSET 24

 

tasmad om ity udahrtya
yajna-dana-tapah-kriyah
pravartante vidhanoktah
satatam brahma-vadinam

 

TRADUCTION

Ainsi, les spiritualistes entament toujours leurs sacrifices, austérités et actes charitables en prononçant le om, afin d'atteindre l'Absolu.

 

TENEUR ET PORTEE

Les pieds pareils-au-lotus de Visnu constituent le lieu suprême de la dévotion. Accomplir toutes choses pour la satisfaction de Dieu, la Personne Suprême, c'est assurer la perfection de tous ses actes.

 


VERSET 25

 

tad ity anabhisandhaya
phalam yajna-tapah-kriyah
dana-kriyas ca vividhah
kriyante moksha-kanksibhih

 

TRADUCTION

On doit accomplir sacrifices, austérités et actes charitables en prononçant le mot tat, si l'on veut connaître le but de ces pratiques spirituelles, qui est de s'affranchir des chaînes de la matière.

 

TENEUR ET PORTEE

Celui qui désire être élevé au niveau spirituel ne doit chercher, par ses actes, aucun profit matériel. Il faut agir dans le but d'obtenir le plus précieux des biens: l'élévation au royaume spirituel, le retour à Dieu, en notre demeure originelle.

 


VERSET 26/27

 

sad-bhave sadhu-bhave ca
sad ity etat prayujyate
prasaste karmani tatha
sac-chabdah partha yujyate

yajne tapasi dane ca
sthitih sad iti cocyate
karma caiva tad-arthiyam
sad ity evabhidhiyate

 

TRADUCTION

La Vérité Absolue constitue le but des pratiques dévotionnelles, et on La désigna par le mot sat. Ces pratiques -sacrifices, austérités et actes charitables-, en harmonie avec l'Absolu, la Personne Suprême, sont pour Lui plaire, ô fils de Prtha.

 

TENEUR ET PORTEE

Les mots prasaste karmani, ou devoirs prescrits, indiquent qu'il existe de nombreuses activités prescrites, mentionnées dans les Ecritures védiques, activités qui représentent des modes de purification, et commencent dès la conception de l'enfant, sous le soin des parents, pour se poursuivre jusqu'au terme de l'existence. Ces rites purificatoires sont exécutés en vue de donner à l'être vivant la libération ultime. Et lors de leur accomplissement, il est recommandé de faire vibrer les sons om tat sat. Quant aux mots sad-bhave et sadhu-bhave, ils indiquent l'appartenance au niveau absolu. L'homme qui agit dans la conscience de Krsna est appelé sattva, et svarupa celui qui a pleine connaissance de la nature des actes dans la conscience de Krsna. Le Srimad-Bhagavatam enseigne que les questions spirituelles s'éclaircissent en la compagnie des bhaktas. Le savoir spirituel et absolu ne peut s'acquérir qu'à travers la compagnie de personnes spirituellement élevées. Lorsqu'un maître initie ou offre le fil sacré à un disciple, il fait également vibrer les sons om tat sat. De même, dans tout ce qu'accomplit le yogi, le but suprême, l'om tat sat, est invoqué. Ces mots, om tat sat, servent à parfaire tout acte. Suprême, l'om tat sat confère à toute chose la plénitude.

 


VERSET 28

 

ashraddhaya hutam dattam
tapas taptam kritam ca yat
asad ity ucyate partha
na ca tat pretya no iha

 

TRADUCTION

Mais les sacrifices, les austérités et les actes charitables accomplis sans foi en le Suprême sont éphémères, ô fils de prtha, quels que soient les rituels qui les accompagnent. On les dits asat, et il sont vanis, dans cette vie comme dans la prochaine.

 

TENEUR ET PORTEE

Qu'il s'agisse de sacrifice, d'austérité ou de charité, tout ce qui n'est pas accompli dans un but spirituel s'avère tout à fait vain. C'est pourquoi notre verset nous laisse entrevoir ce qu'il y a d'abominable en de tels actes. Toutes choses doivent être accomplies pour l'Etre Suprême, dans la conscience de Krsna. Privé d'une telle foi et de la juste direction, on ne récolte jamais aucun fruit. Les Ecrits védiques conseillent tous la foi en l'Etre Suprême. Le but ultime de tous les enseignements védiques est de nous amener à connaître Krsna. Nul ne peut connaître le succès s'il n'observe ce principe. Le mieux sera donc d'agir dans la conscience de Krsna depuis le tout début, sous la conduite d'un maître spirituel authentique. Ainsi, toute entreprise verra sa réussite certaine.

A l'état conditionné, les hommes sont enclins à l'adoration des devas, des spectres, ou des Yaksas (tel Kuvera). La vertu, certes, est supérieure à la passion et à l'ignorance, mais en adoptant directement la conscience de Krsna, on dépasse entièrement les trois gunas. Il existe un processus d'élévation graduel, mais le mieux sera encore de pouvoir, au contact de purs bhaktas, adopter directement la conscience de Krsna. Et c'est ce que recommande ce chapitre. Pour connaître le succès dans cette voie, il faut tout d'abord trouver un maître spirituel approprié qui dirigera notre formation. Alors, il sera possible d'atteindre la foi en l'Absolu, en le Suprême. Foi qui, lorsqu'elle mûrit avec le temps, prend l'appellation d'amour de Dieu. Cet amour représente l'objectif ultime de tous les êtres. On doit donc adopter directement la conscience de Krsna. Tel est le message de ce dix-septième chapitre.

Ainsi s'achèvent les enseignements de Bhaktivedanta sur le dix-septième chapitre de la Srimad-Bhagavad-gita, intitulé: "Les branches de la foi".