SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 3 CHAPITRE 2 Uddhava se souvient de
Sri Krsna.
mam khedayaty etad ajasya janma-
vidambanam yad vasudeva-gehe vraje ca vaso ri-bhayad iva svayam purad vyavatsid yad-ananta-viryah
Puisque Sri Krsna est la Personne originelle, de qui tous les êtres et toutes les choses proviennent -aham sarvasya prabhavah,(l) janmady asya yatah(2)-, rien ni personne ne peut Le surpasser, ni même L'égaler. Le Seigneur jouit de la perfection suprême, et chaque fois que dans le cours de Ses Divertissements spirituels Il joue le rôle de fils, de rival ou d'ennemi, Il le fait de façon si parfaite que même Ses purs dévots, comme Uddhava, en restent confondus. Pour prendre justement l'exemple d'Uddhava, celui-ci savait parfaitement bien que Sri Krsna existe éternellement, qu'Il ne peut ni mourir, ni disparaître à jamais, et pourtant, il s'affligeait du sort de Krsna. De tels événements représentent autant d'arrangements sublimes destinés à parfaire les gloires suprêmes du Seigneur. Ils n'ont d'autre raison d'être que d'apporter du plaisir. Lorsque le père joue avec son jeune fils et qu'il tombe au sol comme s'il avait été vaincu, c'est seulement pour faire plaisir à son fils, et pour aucune autre raison. Parce que le Seigneur est tout-puissant, les contraires peuvent parfaitement trouver en Lui leur juste harmonie -la naissance et la non-naissance, la force suprême et la défaite, la peur et l'absence de crainte... Le pur bhakta sait fort bien que le Seigneur est apte à résoudre ces contradictions apparentes, mais il s'afflige quand les abhaktas, qui ignorent les gloires suprêmes du Seigneur, voient en Lui un être imaginaire à cause précisément de toutes les affirmations en apparence contradictoires que l'on trouve à Son sujet dans les Ecritures. En fait, rien n'est contradictoire en Krsna, et tout est possible lorsque nous réalisons que Krsna est Dieu, et non pas l'un d'entre nous, avec toutes nos imperfections.
(1) "De tous les mondes, spirituel et matériel, Je suis la source; de Moi tout émane." (B.g.,X.8)
dunoti cetah smarato mamaitad
yad aha padav abhivandya pitroh tatamba kamsad uru-sankitanam prasidatam no krta-niskrtinam
Il semble que Krsna et Baladeva avaient tous deux fort peur de Kamsa, et qu'Ils durent Se cacher. Mais, se demandera-t-on, si Krsna et Baladeva sont Dieu, la Personne Suprême, comment ont-Ils pu craindre Kamsa? N'y a-t-il point une contradiction dans ces propos? Vasudeva, en raison de l'affection profonde qu'il portait à Krsna, voulut Le protéger. Jamais il ne pensa que Krsna était le Seigneur Suprême, et donc en mesure de Se protéger Lui-même; non, il voyait en Krsna son fils. Et parce que Vasudeva était un grand dévot du Seigneur, il ne pouvait se faire à l'idée que Krsna puisse être tué comme ses autres enfants. Sur le plan strictement moral, Vasudeva se trouvait dans l'obligation de remettre Krsna aux mains de Kamsa, puisqu'il avait promis de lui donner tous ses enfants; mais son intense amour pour Krsna lui fit briser sa promesse, et le Seigneur fut très heureux de cette attitude spirituelle de la part de Vasudeva. Ne voulant pas troubler ses sentiments profonds, Il Se laissa porter par Son père jusqu'à la demeure de Nanda et Yasoda. Et à seule fin d'éprouver l'intense amour de Vasudeva, Sri Krsna fit une chute dans les eaux de la Yamuna alors que Son père traversait la rivière. Vasudeva en devint comme fou, cherchant partout son fils dans les eaux furieuses. Il s'agit là de Divertissements glorieux du Seigneur, et aucune contradiction n'y apparaît. Puisque Krsna est le Seigneur Suprême, Il n'avait certes aucune crainte de Kamsa, mais pour plaire à Son père, Il accepta de Se montrer craintif. Et le plus sublime trait de Son caractère suprême se manifesta lorsqu'Il implora le pardon de Ses parents pour n'avoir pas été capable de servir leurs pieds alors qu'Il Se trouvait loin du foyer par crainte de Kamsa. Ainsi, le Seigneur, dont les pieds pareils-au-lotus reçoivent l'adoration de devas comme Brahma et Siva, voulait révérer les pieds de Vasudeva. Cet enseignement du Seigneur est tout à fait approprié: même Lui doit servir Ses parents. Le fils doit tout à ses parents; il est donc de son devoir de les servir, aussi élevée soit sa position. Krsna désirait ainsi, par voie indirecte, instruire les athées qui n'acceptent pas la paternité suprême de Dieu, afin qu'ils apprennent par ce geste à quel point le père suprême doit être respecté. Uddhava ne pouvait qu'être frappé d'émerveillement devant ce comportement glorieux du Seigneur, et il se sentait bien triste de ne pouvoir Le rejoindre.
ko va amusyanghri-saroja-renum
vismartum isita puman vijighran yo visphurad-bhru-vitapena bhumer bharam krtantena tirascakara
Jamais il ne faut prendre Sri Krsna pour un simple être humain, même s'Il a joué le rôle d'un fils obéissant. Ses Actes étaient si extraordinaires que par le seul mouvement de Ses sourcils, Il porta des coups mortels à ceux qui représentaient un fardeau pour la Terre.
drsta bhavadbhir nanu rajasuye
caidyasya krsnam dvisato pi siddhih yam yoginah samsprhayanti samyag yogena kas tad-viraham saheta
Sri Krsna manifesta Sa grâce insigne à l'occasion de l'imposant sacrifice organisé par Maharaja Yudhisthira en Se montrant miséricordieux même envers son ennemi, le roi de Cedi, qui s'était toujours acharné à rivaliser avec Lui, par envie. Comme nul ne peut rivaliser de façon honnête avec le Seigneur, le roi de Cedi faisait preuve d'une extrême perfidie à l'endroit de Sri Krsna, en quoi il ressemblait à plusieurs autres asuras, tels Kamsa et Jarasandha. Devant toute l'assemblée réunie pour le sacrifice rajasuya ordonné par Maharaja Yudhisthira, Sisupala insulta Krsna, et dut finalement être tué par le Seigneur. Mais toutes les personnes présentes purent voir une étincelle de lumière jaillir du corps du roi de Cedi pour aller se fondre dans celui de Sri Krsna. Ceci indique que Cediraja obtint la libération, celle qui consiste à ne plus faire qu'Un avec l'Absolu et qui représente un état de perfection ardemment désiré par les jnanis et les yogis, le but même de toutes leurs pratiques spirituelles. Ceux qui s'efforcent de saisir la Vérité Absolue par leurs propres moyens, que ce soit à travers la spéculation intellectuelle ou le développement des pouvoirs surnaturels conférés par le yoga, atteignent le même but que les êtres tués par le Seigneur en personne: c'est là un fait avéré. Les uns comme les autres obtiennent de se fondre dans le brahmajyoti, la radiance du Corps spirituel de Krsna. Ainsi le Seigneur Se montre-t-Il miséricordieux même envers Ses ennemis, et tous les membres de l'assemblée purent constater la bonne fortune qui fut celle du roi de Cedi. Vidura se trouvait également présent à cette occasion, et c'est pourquoi Uddhava rappelle l'incident à sa mémoire.
tathaiva canye nara-loka-vira
ya ahave krsna-mukharavindam netraih pibanto nayanabhiramam parthastra-putah padam apur asya
Le Seigneur Suprême, Sri Krsna, descend en ce monde pour y accomplir deux missions: délivrer les croyants et anéantir les mécréants. Mais parce que le Seigneur est absolu, ces deux voies d'action entraînent finalement le même résultat, bien que leur nature propre semble différer. De fait, la mise à mort d'un être comme Sisupala s'avère aussi propice lorsqu'elle vient de Lui, que Ses gestes protecteurs accomplis en faveur des croyants. Tous les guerriers qui s'opposèrent à Arjuna, parce qu'ils purent contempler le visage pareil-au-lotus de Krsna sur le champ de bataille, atteignirent le royaume du Seigneur, tout comme le font Ses dévots. Les mots "si plaisant au regard" méritent notre attention. Lorsque les guerriers du camp adverse virent Sri Krsna sur le champ de bataille, ils apprécièrent Sa beauté, et leur sentiment d'amour naturel pour Dieu, jusqu'alors assoupi, s'éveilla. Sisupala avait également pu voir le Seigneur, mais il n'avait vu en Lui que son ennemi, de sorte que son amour pour Lui ne s'était pas éveillé. En conséquence de quoi Sisupala obtint de ne plus faire qu'Un avec le Seigneur en se fondant dans l'éclat impersonnel de Son Corps, le brahmajyoti. D'autres, situés dans une position neutre, ne nourrissant qu'une légère affection pour le Seigneur en appréciant la beauté de Son visage, furent aussitôt élevés aux planètes spirituelles, les Vaikunthas. La demeure personnelle du Seigneur s'appelle Goloka Vrndavana, et les royaumes où résident Ses émanations plénières s'appellent Vaikunthas; là, le Seigneur manifeste Sa présence en tant que Narayana. L'amour pour Dieu dort en chaque être, et le processus complet du service de dévotion offert au Seigneur est conçu de manière à réveiller notre amour éternel pour Lui. Cet éveil spirituel s'opère néanmoins selon divers degrés. Ceux dont l'amour pour Dieu se développe jusqu'au plus haut niveau de perfection atteignent la planète Goloka Vrndavana dans le monde spirituel, tandis que ceux qui n'ont ravivé cet amour qu'incidemment ou de par un contact spirituel gagnent les planètes Vaikunthas. Fondamentalement, il n'existe aucune différence matérielle entre Goloka et Vaikuntha; mais sur les Vaikunthas, le Seigneur est servi dans une opulence infinie, alors qu'à Goloka, le service qui Lui est offert revêt l'aspect d'une affection naturelle. Cet amour pour Dieu est ravivé au contact de purs dévots du Seigneur. Les mots parthastra-putah sont particulièrement riches de sens à cet égard. Tous ceux qui purent contempler le ravissant visage du Seigneur sur le champ de bataille de Kuruksetra avaient d'abord été purifiés par Arjuna, sous le coup de ses flèches. Krsna était venu avec la mission de réduire le fardeau du monde, et Arjuna l'assistait en combattant pour Lui. Il avait tout d'abord décliné le combat, et l'enseignement complet de la Bhagavad-gita dut lui être donné pour l'inciter à se battre. En pur dévot du Seigneur, Arjuna préféra lutter plutôt que de suivre sa propre décision, et c'est ainsi qu'il combattit pour assister le Seigneur dans Sa mission. Tous les actes d'un pur bhakta sont d'ailleurs accomplis au nom du Seigneur, car un pur bhakta n'a aucun intérêt personnel. Ainsi, les coups meurtriers d'Arjuna avaient autant de puissance purificatrice que s'ils avaient été portés par le Seigneur en personne. Quand Arjuna frappait de ses flèches un ennemi, celui-ci était immédiatement purifié de toute souillure matérielle, et devenait ainsi digne d'être élevé au monde spirituel. Ceux, parmi les guerriers, qui purent apprécier les pieds pareils-au-lotus du Seigneur et contempler Son visage sur le champ de bataille virent s'éveiller leur amour latent pour Dieu, si bien qu'ils atteignirent aussitôt Vaikunthaloka, et non la lumière impersonnelle du brahmajyoti, comme ce fut le cas pour Sisupala. Ce dernier, au contraire des autres, mourut sans aucune appréciation du Seigneur. Tous atteignirent le monde spirituel, mais ceux qui s'éveillèrent à l'amour de Dieu parvinrent jusqu'aux planètes de ce monde spirituel. Si Uddhava semble se plaindre de ce que sa propre position est inférieure à celle des guerriers morts au cours de la Bataille de Kuruksetra, c'est que ceux-ci ont atteint le royaume de Vaikuntha alors que lui reste ici-bas à pleurer la disparition du Seigneur.
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