En cet âge, le chant du Saint Nom est plus important que le yoga méditatif :

[Maitreya dit à Vidura:] "Se pliant à d'aussi rudes austérités et pratiquant les exercices respiratoires afin d'acquérir la maîtrise du mental et des sens, Maharaja Prithu se fixa graduellement dans la spiritualité et s'affranchit entièrement de tout désir lié à l'action intéressée."

Le mot pranayamaih est ici d'une grande importance puisque généralement les hatha-yogis et les astanga-yogis pratiquent les exercices du pranayama sans toutefois en connaître le but. Le pranayama - l'une des phases de l'astanga-yoga - a pour but de détache le mental et les sens de l'action intéressée. Or, cette notion échappe totalement aux soi-disant yogis de l'Occident. Le but du pranayama n'est pas de rendre le corps vigoureux et apte à fournir de grands efforts; il s'agit plutôt de porter son adoration vers Krishna. Le verset précédent précisait que toutes les activités de Maharaja Prithu - qu'elles relèvent de l'austérité, du pranayama ou de l'astanga-yoga - furent accomplies en vue d'adorer Krishna. Ainsi le roi constitue-t-il également un exemple parfait pour les yogis. Toutes ses activités tendaient à satisfaire Krishna, le Seigneur Souverain.

Le mental de ceux qui se vouent à l'action intéressée est toujours encombré de désirs impurs. L'action intéressée révèle notre aspiration malsaine à dominer la nature matérielle. Tant que l'être demeure la proie de désirs impurs, il est forcé de revêtir différents corps matériels, l'un après l'autre. Les prétendus yogis, qui ignorent le but réel du yoga, ne cherchent qu'à se garder en pleine forme. C'est ainsi qu'ils se vouent à l'action intéressée et se voient contraints, par la force de leurs désirs, de revêtir un nouveau corps. Ils ignorent que le but ultime de la vie est d'atteindre Krishna. Afin d'éviter à ces yogis d'errer à travers les différentes espèces de vie, les sastras stipulent que cette pratique du yoga n'est que perte de temps en cet âge. La seule voie qui permette de s'élever est le chant du maha-mantra Hare Krishna.

Le roi Prithu vécut dans le Satya-yuga, mais à notre époque, cette pratique du yoga est mal comprise par les âmes déchues qui sont incapables de suivre une voie quelconque. D'où l'injonction des sastras : kalau nasty eva nasty eva nasty eva gatir anyatha. On doit en conclure que les prétendues austérités et le yoga auxquels se consacrent karmis, jñanis et yogis restent sans valeur s'ils ne leur permettent pas de s'élever jusqu'au service de dévotion offert à Krishna. Naradhitah : à quoi bon le yoga méditatif, le karma-yoga ou la recherche empirique du savoir si l'on ne cherche pas, par l'intermédiaire de ces activités, à adorer Hari, le Seigneur Suprême ? Pour ce qui est du pranayama, on le pratique également en chantant les Saints Noms et en dansant sous l'effet de l'extase... Ici, le mot pranayama ne se rapporte à aucun autre but; il faut seulement affermir le mental et les sens afin de les utiliser dans le service de dévotion. En notre ère, cette détermination s'acquiert très aisément par le seul chant des Saints Noms : Hare Krishna, Hare Krishna, Krishna Krishna, Hare Hare / Hare Rama, Hare Rama, Rama Rama, Hare Hare.

(Srimad Bhagavatam. 4.23.8)