SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 5 CHAPITRE 13 Suite du dialogue
entre le roi Rahugana et Jada Bharata. VERSET 6
kvacid vitoyah sarito bhiyati
parasparam calasate nirandhah asadya davam kvacid agni-tapto nirvidyate kva ca yaksair hrtasuh TRADUCTION
Parfois, l'être conditionné plonge dans une rivière qui se révèle peu profonde ou va quémander de la nourriture à des gens qui ne sont nullement enclins à la charité. Parfois, il souffre de vives brûlures occasionnées par la vie familiale, semblable à un incendie de forêt; d'autres fois, il se désespère en voyant ses richesses, qui lui sont aussi chères que sa propre vie, pillées par des rois qui l'écrasent d'impôts.
TENEUR ET PORTEE Lorsqu'on est accablé par la chaleur ardente du soleil, on plonge parfois dans une rivière pour se rafraîchir; cependant, si celle-ci est presque asséchée, on risque de se rompre les os. L'être conditionné se trouve ainsi constamment confronté à diverses conditions misérables. Parfois, ses efforts pour obtenir de l'aide de certains amis ne valent guère mieux que de plonger dans une rivière asséchée; il n'en tire aucun bénéfice et ne réussit qu'à se rompre les os. Parfois encore, souffrant d'un manque de nourriture, il en vient à requérir l'assistance d'une personne qui n'est ni en mesure de faire la charité ni disposée à la faire. Et lorsqu'il est ancré dans la vie de famille, il est comme entouré d'un incendie de forêt (samsara-davanala-lidha-loka). Lorsque le gouvernement l'écrase d'impôts, il se désespère. Les impôts excessifs l'obligent à camoufler ses véritables revenus; mais en dépit de ses efforts, les agents du gouvernement sont en général si vigilants et si habiles qu'ils finissent de toute façon par s'emparer de son argent, ce qui le remplit d'amertume. Les gens cherchent donc le bonheur en ce monde, mais c'est comme s'ils cherchaient à être heureux au coeur d'un incendie de forêt. Ce genre de sinistre se déclare tout seul, sans que personne n'ait besoin d'allumer un feu; de même, personne ne veut être malheureux dans sa vie familiale ou sociale, mais les lois de la nature imposent le malheur et la souffrance à tous les êtres. Il est très dégradant d'avoir à dépendre d'une autre personne pour vivre; c'est pourquoi, selon la culture védique, chacun devrait vivre de façon autonome. Seuls les sudras en sont incapables; ils doivent servir quelqu'un pour assurer leur subsistance. Or, les sastras nous disent: kalau sudra sambhavah. Dans l'âge de Kali, chacun dépend de la miséricorde d'un autre pour sa subsistance, de telle sorte que tout le monde appartient à la classe des sudras. Le douzième Chant du Srimad-Bhagavatam déclare en outre que, dans le Kali-yuga, les gouvernements prélèveront des impôts sans rendre aux citoyens des services proportionnels. Anavrstya vinanksyanti durbhiksa-kara- piditah. En outre, la pluie viendra à manquer, et la nourriture se fera ainsi de plus en plus rare, alors que les gens seront écrasés sous le poids des impôts gouvernementaux. Ils renonceront alors à mener une existence paisible, et ils quitteront leurs foyers et leurs terres pour se rendre dans la forêt, tous leurs espoirs déçus. VERSET 7
surair hrta-svah kva ca nirvinna-cetah
socan vimuhyann upayati kasmalam kvacic ca gandharva-puram pravistah pramodate nirvrtavan muhurtam TRADUCTION
Lorsque l'être conditionné est vaincu ou pillé par des individus plus puissant, que lui et qu'il perd ainsi tous ses biens, il sombre alors dans une profonde tristesse et, s'affligeant sur son sort, tombe même parfois dans l'abattement complet. D'autres fois, il imagine une grande et fastueuse cité où il lui plairait de vivre heureux avec sa famille ainsi que ses richesses. Il se croit alors aussi satisfait qu'on puisse l'être, mais ce prétendu bonheur ne dure qu'un temps.
TENEUR ET PORTEE Ici, les mots gandharva-puram sont riches de sens. Il arrive parfois qu'on voie apparaître un immense palais au coeur de la forêt, mais ce genre de vision n'est qu'un fantasme, car en fait ce palais n'existe nulle part ailleurs que dans l'imagination. C'est ce qu'expriment les mots gandharva-pura. Dans la forêt matérielle, l'être conditionné se prend parfois à contempler de grands châteaux ou des gratte-ciel où il aimerait vivre à jamais dans la paix en compagnie de sa famille, mais il ne fait que gaspiller son énergie; les lois de la nature ne permettent pas la réalisation de ce rêve. Lorsqu'il parvient à pénétrer dans ces palais et à s'y installer, il pense pour un temps y être très lie heureux, bien que son bonheur soit voué à prendre fin un jour. Ce bonheur peut durer quelques années, mais étant donné que le propriétaire du château doit le quitter à l'heure de sa propre mort, tous ses rêves s'écroulent en fin de compte. Ainsi vont les choses en ce monde... Srila Vidyapati décrit ce bonheur comme celui que procure la vue d'une goutte d'eau dans le désert. Le soleil y fait régner une chaleur torride, et pour en abaisser la température, il faudrait des quantités d'eau phénoménales, des millions et des millions de litres! Quel effet pourrait bien avoir une seule goutte d'eau? Certes, l'eau a de la valeur, mais une goutte à elle seule ne peut réduire la chaleur du désert. Chaque être se montre ambitieux dans le désert de ce monde, mais la chaleur y est très accablante; de quel secours alors nous sera un fantasme? Aussi, Srila Vidyapati chante-t-il: tatala saikate, vari-bindu-sama, suta-mita-ramani-samaje -le bonheur que procurent la vie de famille, l'amitié et les liens sociaux ressemble à une goutte d'eau dans le désert brûlant. L'univers matériel tout entier s'efforce de trouver le bonheur, car il est la prérogative de l'être vivant. Malheureusement, pour être entré en contact avec la matière, celui-ci en est réduit à lutter pour sa subsistance. Même si l'on est heureux pendant un certain temps, un puissant ennemi risque toujours de venir nous dérober tout ce que nous avons. Bien des exemples nous montrent de riches hommes d'affaires qui, du jour au lendemain, se sont trouvés à la rue, réduits à la plus extrême pauvreté. Néanmoins, du fait de la nature de l'existence matérielle, les sots se laissent fasciner par les mouvements qui lui sont liés et oublient le but véritable de l'existence: la réalisation spirituelle. VERSET 8
calan kvacit kantaka-sarkaranghrir
nagaruruksur vimana ivaste pade pade bhyantara-vahninarditah kautumbikah krudhyati vai janaya TRADUCTION
Voulant gravir les collines et les montagnes, il se déchire les pieds en marchant sans protection suffisante sur des épines et des éclats de pierres, ce qui ne manque pas de l'accabler. De même, celui qui éprouve un attachement profond pour sa famille est parfois pris par la faim, et du fait de sa situation misérable, il s'emporte alors contre les siens.
TENEUR ET PORTEE Ambitieux, l'être conditionné voudrait vivre très heureux ici-bas auprès famille de sa famille, mais il est comparé à un voyageur qui désire gravir une montagne dont le sol est jonché d'épines et de petits cailloux. Comme l'indiquait le verset précédent, le bonheur qui découle des rapports sociaux, de l'amitié et de l'amour de ce monde, ressemble à une goutte d'eau dans la chaleur torride du désert. Vouloir acquérir puissance et prestige dans la société revient à tenter d'escalader une montagne jonchée d'épines. Srila Visvanatha Cakravarti Thakura compare la famille à de hautes montagnes; chercher le bonheur auprès de ses proches peut être comparé à l'effort d'un homme affamé essayant de gravir une montagne dont le sol est parsemé d'épines. 99,9% des gens pour ainsi dire sont malheureux au sein de la vie familiale, en dépit de tous leurs efforts pour satisfaire les membres de leur famille. Dans les pays d'Occident, l'insatisfaction est si grande qu'il n'y a pour ainsi dire pas de vie de famille. On compte de nombreux cas de divorce, et les enfants, eux-même frustrés, renoncent à la protection de leurs parents et quittent le foyer. Dans l'âge de Kali tout particulièrement, la vie de famille proprement dite est de plus en plus réduite. On y devient de plus en plus égocentrique, ainsi le veut la loi de la nature. Même si l'on a suffisamment d'argent pour pourvoir aux besoins des siens, la situation est telle que personne n'est plus heureux en famille. Voilà pourquoi, selon l'institution du varnasrama, il faut se retirer de la vie familiale une fois passée la moitié de sa vie: pancasordhvam vanam vrajet; on doit de son plein gré renoncer à la vie de famille vers la cinquantaine pour se rendre à Vrndavana ou dans la forêt. Srila Prahlada Maharaja le recommande lui-même : tat sadhu manye sura-varya dehinam
Il ne s'agit pas de quitter une forêt pour aller dans une autre; cela n'aurai aucun intérêt. Il faut se rendre dans la forêt de Vrndavana et y chercher refuge en Govinda. On sera alors très heureux. C'est pourquoi l'Association Internationale pour la Conscience de Krsna a construit un temple dédié à Krsna et à Balarama afin d'y recevoir ses membres ainsi que tout un chacun. Tous ceux qui en bénéficieront pourront vivre paisiblement dans une atmosphère spirituelle, ce qui les aidera à atteindre le monde de la transcendance et à retourner à Dieu, dans leur demeure originelle. Un autre passage de ce verset doit retenir notre attention: kautumbikah krudhyati vai janaya. Lorsqu'il est exaspéré, l'homme cherche à se soulager en s'emportant contre sa pauvre femme et ses enfants. La femme et les enfants dépendent naturellement du père, mais celui-ci, se voyant incapable d'entretenir sa famille correctement, se déprime et s'en prend sans nécessité aux siens. Le Srimad-Bhagavatam (12.2.9) enseigne également à ce propos: acchinna-dara-dravina yasyanti giri-kananam. Dégoûtés de la vie de famille, les gens se séparent par le divorce ou par quelque autre moyen. Mais si l'on doit se séparer, pourquoi ne pas le faire de son plein gré? Une séparation systématique et délibérée vaut mieux qu'une séparation forcée qui ne peut rendre personne heureux. Quoi qu'il en soit, par consentement mutuel ou suivant l'usage védique, on doit se retrancher des affaires familiales à un certain âge pour ne plus dépendre que de Krsna. Voilà qui couronnera de succès notre existence.
sada samudvigna-dhiyam asad-grahat hitvatma-patam grham andha-kupam vanam gato yad dharim asrayeta (S.B.,7.5.5) VERSET 9
kvacin nigirno jagarahina jano
navaiti kincid vipine paviddhah dastah sma sete kva ca danda-sukair andho ndha-kupe patitas tamisre TRADUCTION
L'âme conditionnée parcourant la jungle matérielle est parfois dévorée ou broyée par un python. Abandonnée dans la forêt, elle gît alors comme un cadavre, privée de conscience et de connaissance. Parfois même, d'autres serpents venimeux viennent la mordre. Aveuglée, elle tombe dans le puits sombre d'une existence infernale sans aucun espoir qu'on lui porte secours.
TENEUR ET PORTEE Si quelqu'un perd conscience après avoir été mordu par un serpent, il perd en même temps tout moyen de comprendre ce qui se passe en dehors de son corps. Cette condition est comparable à celle du sommeil profond. Or, l'âme conditionnée se trouve ainsi endormie dans le sein de l'énergie d'illusion. Bhaktivinoda Thakura chante: kata nidra yao maya-pisacira kole -''Ame endormie, jusqu'à quand sommeilleras-tu ainsi dans les bras de l'énergie d'illusion?'' Les gens ne comprennent pas qu'en fait ils dorment en ce monde matériel, dénués de toute connaissance de la vie spirituelle. C'est pourquoi Caitanya Mahaprabhu dit:
enechi ausadhi maya nasibara lagi hari-nama-maha-mantra lao tumi magi ''J'ai apporté le remède au sommeil perpétuel dans lequel sont plongés tous les êtres. Acceptez, je vous en prie, le Saint Nom du Seigneur, le maha-mantra Hare Krsna, et réveillez-vous." La Katha Upanisad (1.3.14) dit de son côté: uttistha jagrata prapya yaran nibodhata -"O âmes conditionnées, vous dormez en ce monde; réveillez-vous, et tirez parti de votre existence humaine.'' Le sommeil implique la perte de toute connaissance. La Bhagavad-gita (II.69) ajoute à cet égard: ya nisa sarva-bhutanam tasyam jagarti samryami. "Ce qui est nuit pour tous les êtres devient, pour l'homme qui s'est rendu maître de ses sens, le temps de l'éveil." Même sur les planètes supérieures, tous subissent le charme de l'énergie d'illusion. Personne ne s'y montre vraiment intéressé par les valeurs réelles de la vie. Le sommeil profond, qui a pour nom kala-sarpa (le facteur temps), maintient l'âme conditionnée dans l'ignorance, de telle sorte que sa conscience pure est perdue. Il y a de nombreux trous profonds dans la forêt, et si quelqu'un tombe dans l'un d'eux, il n'a aucune chance d'en être tiré. Profondément endormi, il est continuellement mordu par certaines bêtes, et particulièrement par des serpents. VERSET 10
karhi sma cit ksudra-rasan vicinvams
tan-maksikabhir vyathito vimanah tatrati-krcchrat pratilabdhamano balad vilumpanty atha tam tato nye TRADUCTION
Parfois, afin de goûter quelque plaisir charnel insignifiant, l'être conditionné part à la recherche de femmes faciles; il doit alors supporter les insultes et les sévices de ses proches, tout comme celui qui se fait attaquer par les abeilles en voulant prendre le miel de leur ruche. Parfois encore, après avoir dépensé beaucoup d'argent, il parvient à obtenir une autre femme pour satisfaire sa concupiscence; malheureusement, celle qu'il a conquis pour son plaisir est emmenée ou ravie par un autre débauché.
TENEUR ET PORTEE Dans une grande forêt, les ruches sont bien garnies et souvent les gens s'y rendent pour recueillir le miel qui se trouve dans les rayons; mais il arrive alors que les abeilles attaquent les intrus afin de les punir de leur audace. Ainsi, dans la société des hommes, ceux qui n'ont pas conscience de Krsna demeurent dans la forêt de l'existence matérielle à seule fin de jouir du miel de la vie sexuelle. Ces débauchés ne sont nullement satisfaits avec une seule femme; ils en veulent plusieurs. Jour après jour, à grand-peine, ils s'efforcent de s'approprier les femmes qu'ils convoitent, et parfois, tandis qu'ils essaient de goûter cette sorte de miel, ils se font attaquer par leurs proches et très durement châtier. En soudoyant quelqu'un on parvient toujours à s'approprier une autre femme pour son plaisir, mais un autre débauché risque alors de l'enlever ou de lui offrir plus qu'on ne peut soi-même le faire. C'est ainsi que la chasse aux femmes se poursuit dans la forêt de l'univers matériel, parfois dans la légalité et parfois illégalement. En conséquence, le Mouvement pour la Conscience de Krsna interdit à ses bhaktas toute vie sexuelle illicite, leur épargnant ainsi bien des difficultés. L'homme doit se contenter d'une femme, ceci dans les liens du mariage; il peut alors satisfaire ses désirs charnels sans avoir à perturber la société et à être puni pour sa conduite.
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |